INDUSTRIES CREATIVES : EMERGENCE D’UNE « TERRE DU MILIEU »

Internet et la révolution numérique ont permis l'émergence d'un espace nouveau d'expression et de création qui apparaît entre les blockbusters et les contenus UGC de la longue traîne, estime une étude du cabinet Bain, publiée aujourd'hui lors du Forum d'Avignon (médias, économie, culture), et qui annonce la convalescence longtemps attendue de l'industrie de la musique.
"En abaissant les barrières historiques à la création et à la distribution, le numérique offre à un large public des expériences nouvelles ou peu diffusées aujourd’hui. Les exemples de la télévision, de la musique et du cinéma suggèrent chacun à leur niveau un « rééquilibrage » potentiel entre blockbusters et créations de qualité mais davantage segmentées – l’émergence d’une « terre du milieu » au sein des industries culturelles".
"Cette « terre du milieu » dans le monde des médias (est) un espace intermédiaire entre franchises de masse et contenus de niche, qui ouvre de nouveaux horizons de croissance dans une industrie pour laquelle les nouvelles idées n’ont jamais fait défaut."

"Cela permet à des contenus de trouver leur public et leur audience, et à des auteurs d'en vivre", nous a expliqué Patrick Béhar, Associé de Bain, qui dirige le pôle média pour l'Europe et le Moyen Orient.

"Par exemple, souligne l'étude, l’audience moyenne d’un film du top 10 en France est 27% inférieure en 2010 par rapport à 1998, quand dans le même temps l’audience moyenne des films classés de 11 à 100 a quasiment doublé.

De la même façon dans la musique, on observe une baisse du poids des blockbusters – les ventes d’albums du top 10 aux EtatsUnis ont par exemple diminué beaucoup plus rapidement que les ventes totales. Ce rééquilibrage progressif, observé de longue date, devrait être prolongé par les nouveaux prescripteurs, notamment les communautés sociales en ligne, qui ont démontré leur capacité à faire accéder des contenus ciblés à de larges audiences, de façon virale".

 

Défis à relever pour que cette tendance tienne ses promesses:

"Les plates-formes commerciales – confrontées à l’explosion de l’offre et de demande de produits et services  culturels – seront contraintes à inventer et réinventer sans cesse de nouveaux modèles économiques pour accompagner les usages des consommateurs et faire vivre les élans créatifs des artistes.

Les pouvoirs publics auront la lourde tâche d’adapter un cadre réglementaire essentiel à la pérennité de l’écosystème de la création mais qui peine parfois à suivre le rythme soutenu d’innovation dont font l’objet les industries culturelles.

Les créateurs, qui n’ont probablement jamais eu autant de moyens créatifs à leur disposition, devront à la fois gérer les retours directs d’audiences décuplées et potentiellement mondiales, développer leurs propres compétences marketing (notamment sur les réseaux sociaux) en complément des services proposés par leurs partenaires, et affronter la « concurrence » d’un vivier de talents toujours plus large"

 

Dressant à grands traits un bilan des sept dernières années de la révolution numérique, Bain estime que :

  • "Après sept ans de décroissance, de restructuration et de diversification, l’espoir d’une fragile convalescence renaît enfin pour l’industrie musicale. (....) Le  croisement entre ventes physiques et ventes dématérialisées dans les marchés les plus matures suggère la stabilisation fragile de l'industrie) (...).
  • De son côté, la vidéo non linéaire est à peine entrée dans les foyers que les tablettes annoncent déjà l’ère de la TV sociale.
  • La migration numérique du monde de l’édition est aujourd’hui menacée par de fortes incertitudes réglementaires, à la fois en Europe et aux Etats-Unis.
  • Et l’industrie du jeu vidéo, pourtant en principe « nativement numérique », est bousculée par les modèles freemium sur le web".