Annonceurs, éditeurs saisissez-vous des codes des jeunes !

Par Barbara Chazelle, France Télévisions, Directions Stratégie et Prospective

Ipsos a présenté cette semaine sa nouvelle étude « Junior Connect » qui dresse le portrait des moins de 20 ans et exhorte annonceurs comme éditeurs à se saisir des codes des jeunes qui ne s'informeront ni ne se divertiront comme nous, à l'avenir. 

Près d’un enfant sur cinq âgé de 7 ans et plus possède une tablette

 Aux Etats-Unis, ce taux atteint déjà 25%.

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En 4 ans, la tablette s’est imposée dans près d’un foyer avec enfant sur deux ; ce chiffre était encore de 22% l’année dernière. Les foyers sans enfant sont équipés à 32% (vs 16% en 2012).
D’après Bruno Schmutz, Directeur Général d’Ipsos MédiaCT, ce fait témoigne de « la force prescriptive des enfants dans le foyer », tout en tenant compte qu’un foyer avec enfant est aussi un foyer plus jeune et naturellement plus technophile.

 Les jeunes sont multi-équipés

Les enfants et jeunes adultes possèdent plusieurs écrans, à commencer par une console de jeux à plus de 63% d'entre eux. L’entrée au collège constitue un élément de rupture entre les 7-12 ans et les 13-19 ans ; les plus âgés s’équipent alors d’ordinateur à 70% mais surtout d’un smartphone pour plus de 50% d’entre eux.

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Notons d’ailleurs que l’âge est bien plus différenciant que le sexe ; le nombre moyen d’équipements est similaire pour les filles et les garçons.

Usages : communication, partage et divertissement

9 jeunes équipés sur 10 utilisent des applications mobiles, dans la majeure partie des cas gratuites, pour communiquer, partager et se divertir.

Désormais plus sensibilisés à la protection de leur vie privée mais aussi parce que Facebook n’est plus le lieu privilégié de l’intimité, les jeunes semblent délaisser le réseau social de Mark Zuckerberg : 79% d’entre eux le fréquentaient en 2013 contre 85% en 2012. Tendance inverse pour Twitter qui séduit désormais 22% des jeunes contre 8% l’année précédente.

Ce fait illustre un phénomène plus large encore, celui de « l’essor de l’éphémère » dont WhatsApp et SnapChat sont les champions.

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Les jeux et les vidéos restent au top des intérêts des jeunes.

75% d’entre eux jouent désormais sur leur smartphone ou leur tablette.

9 jeunes sur 10 regardent des vidéos sur internet, à 82% via un site de partage comme YouTube, 69% sur un site de replay, 55% via le site d’une chaîne TV. Les offres de VOD et de SVOD séduisent de plus en plus. Aux Etats-Unis où ce dernier type d’offre est déjà bien installé avec des acteurs tels que Netflix ou Hulu+, 56% des foyers avec enfant ont souscrit à un abonnement de SVOD, contre 33% des adultes sans enfant.

La lecture n’en est pas pour autant délaissée. 31% des 7-19 ans sont considérés par l’Institut comme étant de « gros lecteurs », pouvant jusqu’à lire la presse jeunesse 4h par semaine en moyenne pour les 7-12 ans.

« Ce n’est pas parce qu’on va proposer plus de contenus numériques que nos chaînes ou nos magazines vont en souffrir. Nous comptons 50 millions de vues en catch up et nos chaînes ne se sont jamais aussi bien portées », a réagi le groupe Disney.

Un temps « on screen » saturé ?

 90% des 13-19 ans se connectent tous les jours mais aussi 40% des 7-12 ans.

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Mais le temps total passé devant les écrans ne progresse plus pour la première fois cette année. Comment l’expliquer ?

Premièrement, il est vrai que les chiffres ci-dessus sont déjà conséquents. Près de 2 jeunes sur 3 déclarent dîner régulièrement devant un écran.
On notera  par ailleurs que l’activité la plus importante en termes de temps passé est le fait de regarder la TV pour les 7-12 ans (9h50 par semaine en moyenne) et de surfer sur internet pour les 13-19 ans (11h45 par semaine en moyenne) ; 1 lycéen sur 2 déclare être dépendant à internet.

Deuxièmement, on constate un transfert des usages d’un écran à un autre, au détriment de l’ordinateur.

Troisièmement, l’usage du multitasking est important et toujours en progression.

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 Enfin, selon Ipsos, le temps consacré aux activités « hors écran » ne baisserait pas et resterait cher aux jeunes.

Les annonceurs et éditeurs doivent se saisir des codes utilisés par les jeunes

« La tendance est à l’individualisation de l’enfant. Les moins de 20 ans ne se définissent pas uniquement pas leur sexe et leur âge mais aussi par des centres d’intérêt et des styles de vie multiples » a expliqué Sylvie Gassmann, Directrice de département chez Ipsos. Cela ouvre potentiellement la voie à qui veut bien l’entendre à un marketing de niche qui adresserait la pluralité de la jeunesse. « La publicité doit être au rythme de SnapChat et de Candy Crush : simple, immédiate et probablement éphémère. Le storytelling comme nous le connaissons arrive à son terme. Et comme Candy Crush c’est-à-dire en usant de mécanisme de gamification ; une publicité doit être distrayante » a-t-elle ajouté.

Rémy Oudghiri, Directeur de département chez Ipos, a précisé que loin d’être passifs, les jeunes sont une « génération de makers », qui a envie de faire. L’abondance des « tutos » sur internet mais aussi les MOOCs qui transmettent un savoir et un savoir faire, le leur permettent.

Le bon curseur

Pascal Ruffenach, Directeur du pôle jeunesse chaz Bayard, a réagi à la présentation d’Ipsos en rappelant que « tout ce qui est possible n’est pas forcément nécessaire. Je ne sais pas comment se construit un Homme sans histoire, sans long format, sans avoir développé sa capacité d’attention. »

« L’attente est un facteur essentiel à la construction de l’enfant » a ajouté Marie-Denis, Directrice Générale des Editions Milan.

Un récent article du Huffington Post a dévoilé les résultats d’une étude de L’Académie des Pédiatres Américains et de la Société des Pédiatres Canadiens qui conseille de n’exposer les enfants et jeunes adultes aux technologies que de manière restreinte, voire nulle pour les 0-2 ans.

techno jeunesCes scientifiques donnent 10 raisons pour appuyer leur recommandation : les enfants risqueraient une croissance trop rapide du cerveau, un retard de développement, de souffrir d’obésité, de troubles du sommeil, de maladies mentales, de déficit d’attention, de dépendance, seraient soumis à l’émission d’ondes  néfastes à leur organisme en développement, d’être plus agressifs, voir d’être « hors service ».

Plus de résultats sont donnés sur le site http://www.zonein.ca/

Appel à la sagesse donc pour les parents, les enseignements mais aussi les éditeurs qui doivent plus que jamais être des repères et donner des clés pour utiliser de manière intelligente et raisonnable les nouvelles technologies.

(L’institut a interrogé 4.000 enfants et jeunes adultes entre juin et novembre 2013.)