Journaux : 3 conseils de l'iTunes de la presse

Par Barbara Chazelle, France Télévisions, Directions Stratégie et Prospective

« Les jeunes ne veulent pas payer pour de l’info. Mais il y a 10 ans, on disait pareil pour la musique ! », a rappelé Marten Blankesteijn, co-fondateur de Blendle, invité cette semaine par le CFJ pour sa leçon inaugurale. Aujourd’hui, les jeunes paient $ 10 par mois pour Spotify alors qu’on trouve de la musique gratuite sur YouTube. 

Blendle, c’est la start-up news de la rentrée en Europe. Souvent décrite comme l’ « iTunes de la presse », le modèle de la plateforme néerlandaise, soulève de grands espoirs dans le monde de la presse.

1. Etre fun et aussi simple que de payer une appli

L’idée de Blendle c’est de mettre à disponibilité des lecteurs des articles de journaux et magasines, payables à la pièce entre 10 et 80 centimes d’euros, avec un crédit de 2,50 € en cadeau à l’inscription. L’acte de paiement se fait sans friction, simplement en cliquant sur l’article, sans avoir à confirmer quoi que ce soit. Et si le lecteur n’a pas aimé ce qu’il a lu, il peut être remboursé. Seuls 3% des utilisateurs en font la demande.

« Les gens achètent des pulls sur internet parce qu'ils savent qu'ils peuvent le retourner si ça ne va pas. Sinon, personne n'achèterait sur internet ! »

Résultat : 125.000 utilisateurs (pour 16 millions d’habitants aux Pays-Bas) en 5 mois, dont  2/3 ont entre 20 et 35 ans, qui dépensent en moyenne 50 centimes par jour ! Panier moyen en constante augmentation qui plus est.

Pas de cannibalisation donc car cette cible jeune atteinte par Blendle avait déserté les paywalls traditionnels. Le partage des revenus à 30 / 70 pour les éditeurs (comme le modèle Apple) permet à ces derniers de profiter d’une nouvelle source de recette sans trop d’effort.

« Il n’est pas trop tard ! », assure Marten Blankesteijn.

« Les éditeurs aiment les abonnés mais ils ont oublié qu’il y a un groupe de personnes qui ne veut pas s’abonner mais qui est enclin à payer de temps en temps. »

Le succès de Blendle n’est « pas uniquement une question de prix, mais d’expérience et d’opportunités. »

« Je ne pense pas que les éditeurs qui proposent du bon contenu gratuit le feront encore d’ici 3 ans »

2. Les marques restent importantes

Parce que la réputation de marques de presse prestigieuses ne s’est pas faite en un jour, il est toujours pertinent de miser sur elles. De telles renommées sont plus difficiles à acquérir par des personnes. Les marques restent un argument de vente mais aussi un argument de recrutement dans la guerre des talents qui sévit à l’heure numérique.

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3. Mais besoin d’un meilleur journalisme

Marten Blankesteijn a enfin encouragé les futurs journalistes du CFJ à se surpasser et à amener le niveau du journalisme un cran au-dessus que celui de leurs prédécesseurs.

« Vous devriez lire les journaux d’il y a 40 ans ; ils n’étaient pas bons du tout ! » Pourquoi ? Parce qu’il y avait peu de concurrence entre les journalistes ; si quelqu’un était abonné au Monde, il ne lisait que Le Monde et ne comparait pas un article avec ceux d’autres journaux sur le même sujet.

« On ne peut plus se contenter d’écrire des histoires ; il faut écrire la meilleure histoire ! »

Blendle est la preuve que l’on peut encore changer le journalisme de l’intérieur et que l’Europe a toute sa légitimité sur le sujet. Forte de ses premiers succès, la plateforme prévoit une expansion à l’international dans un ou deux pays d’ici l’année prochaine. Il n'a pas dit lesquels !