TV connectée : 10 ans de chaos devant nous !

 

« Dans l’univers de la TV, le chaos va régner sur les 10 prochaines années ! ». Voilà l’avenir que nous a prédit cette semaine à Londres Jeff Binder, associé de la firme de capital risque américaine Genovation Capital, spécialisée dans l’innovation médias/tech.

Elle résume bien l’incertitude qui a régné lors de la conférence annuelle de la TV connectée où les délégués, toujours dans le brouillard sur l’avenir de la télé, sont repartis avec plus de questions que de réponses et plus d’acronymes que de chiffres !

10 choses à retenir :

1 - Le génie est bien sorti de la bouteille ! Le basculement vers une TV à la demande, en mode non linéaire multi-écrans, via Internet en streaming, même encore assez lent, a bien débuté. Et ne fait que commencer. Chaque mois arrivent de nouvelles propositions d’expérience. Nos salons -- où les écrans sont plus nombreux que les coussins sur le canapé -- ressemblent désormais à des tours de contrôle !

2 - Dans ces nouvelles formes de consommation, il y a de moins en moins de vrai direct, et, surtout, celles via mobiles progressent plus vite que via les « Smart TV ». La VOD devient une chaîne ! L’usager commence à avoir beaucoup de choix et se moque du tuyau par lequel on le lui propose !  

3 - On parle pourtant moins de remplacement de la télé que d’enrichissement de l’expérience TV. Méthode Coué ou certitude de voir le temps dédié à la TV rester stable à son très haut niveau actuel, voire tiré par la consommation non linéaire ?

4 - L’innovation est aujourd’hui essentiellement cantonnée dans le second écran, les contenus de niche et le sport. Et il y aura d’autres YouTube et d’autres Netflix !  

5 - Les box des opérateurs et des chaînes payantes sont appelées à disparaître pour laisser place petit à petit à des services hébergés dans "le cloud ». Chacun rêve de devenir "le Spotify de la télé", mais les problèmes de droits des œuvres freinent considérablement le mouvement. Et l’inter-opérabilité s'éloigne chaque jour un peu plus. 

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6 - Les modes de connexion du téléviseur et d’accès aux contenus enrichis demeurent tellement compliqués que la tablette devient le 1er écran pour s’abonner à des services de vidéo à la demande.

7 - Le fameux ratio connectables/connectés varie entre 30% (pour les chaînes qui mesurent) et 60% (selon les fabricants). Les utilisateurs des Smart TV sont pour l’instant essentiellement masculins (75% pour l’allemand ProSieben) et souvent des enfants (pour l’espagnol RTVE). 

8 - L’engagement de l’audience et un « reach » supérieur (rajeunissement) sont cités le plus souvent parmi les avantages de cette nouvelle consommation en ligne.

9 - Tous les acteurs du secteur tentent d’imaginer les moyens de faire découvrir le plus simplement possible tous ces contenus et ces œuvres.

  • Les uns cherchent à le faire en protégeant leurs positions tout en profitant des nouveaux outils (chaînes historiques, telcos…), et en se positionnant comme agrégateurs et guides.
  • Les autres, en distribuant à des coûts ridiculement faibles, bousculent tout le monde (YouTube est déjà la 3ème chaîne en Suède en temps passé, Netflix a conquis 18% des Norvégiens en quelques mois, Amazon est en embuscade…).
  • D’autres encore tentent de s’intercaler (nombreuses sociétés de services, second écran, Social TV, Cloud ...).

10 - Des partenariats se nouent de plus en plus entre les acteurs de la TV payante et  les nouveaux acteurs de l’OTT : Time Warner avec Roku, Direct TV avec Samsung, Sky avec Zeebox et Roku… mais la vidéo reste peu profitable.

Quelques chiffres :

BBC : « croissance explosive » de la consommation de contenus via l’iPlayer (disponible sur 600 terminaux différents) qui a fait un nouveau bond de 46% en 2012 ! Nouveau record en mars de 273 millions de vidéos consommées en ligne. 

L’iPlayer compte 16 millions d’utilisateurs par semaine, soit déjà le quart de la population britannique.

Les mobiles représentent 36% de ces usages contre (17% en 2011). L’appli de la BBC est la plus téléchargée du magasin iPad !

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La stratégie de la BBC en matière de TV connectée est de d’aller au delà de la consommation par PC, au delà aussi de la catch-up et de ne plus être cantonnée aux télénautes avertis. Elle développe de plus en plus de contenus originaux pour le web, y propose des premières, et vise aussi la jeunesse. 

 

RTL Group: la consommation de TV en mode non linéaire représentera 10% en 2015 pour aller assez vite vers 20% (contre 4% aujourd’hui). Dans ses quatre grands marchés européens, RTL a enregistré l’an dernier une hausse de 131 % du nombre de vidéos vues sur 2010, pour atteindre 7 milliards. La catch-up et les vidéos courtes ont tiré l’ensemble.

 

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La consommation chez RTL Group par plateforme :

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Sky Deutschland : la consommation via Internet de TV en Allemagne devrait se faire 38% via mobiles en 2016 (contre 18% en 2012 et 11% en 2011). La part des Smart TV atteindra 16% à cette date (contre respectivement 5 et 2%).  

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10 ans de chaos ? A moins qu’Apple, une fois de plus, mette tout le monde d’accord.

« la capitalisation boursière d’Apple est aujourd’hui, à elle seule, une fois et demi supérieure à celle de tous acteurs de la TV payante réunis ! », observe Jeff Binder.