Par Mathias Virilli, France Télévisions, Direction de la Prospective
Même avec ses particularités linguistiques, les grandes tendances de la télévision au Canada confirment celles observées chez son voisin américain : une consommation traditionnelle qui s'effrite, et des Canadiens qui regardent de plus en plus leur contenus télévisuels en ligne, et sur différentes plateformes.
Un recul de la consommation de télévision tous âges confondus
Les canadiens passent en moyenne 20 minutes de moins par semaine devant leur télé qu’en 2012, indique la première partie du Rapport de surveillance des communications du CRTC qui détaille cette semaine l’état de l’industrie des communications canadienne pour 2013, soit 600 services de TV.
Cette baisse de consommation télé s’observe sur toutes les tranches d’âge, et particulièrement chez les jeunes : les 12-17 ans ont regardé la télé en moyenne 1h40 de moins en 2013 qu’en 2012, soit une baisse de 7,5%.
Les canadiens se tournent vers d’autres plateformes pour consommer leurs contenus télévisuels
Si la consommation de télévision a tendance à baisser, la TV par Internet connaît de plus en plus de succès : 41% des canadiens ont regardé la télévision sur Internet en 2013.
En moyenne, ils regardent près de 2h de contenu télé en ligne chaque semaine, contre 1h20 en 2012. Parmi les consommateurs réguliers, cette moyenne monte même à plus de 5h par semaine, soit deux heures de plus qu’en 2012.
3/4 des sondés auraient visionné au moins une vidéo en ligne, dont 64% sur Youtube. En termes de contenus, les vidéonautes canadiens sont également friands de films (30%) et d’actu (25%).
La consommation de vidéos et d’émissions TV connait de plus une adoption croissante sur les appareils mobiles. 12% des anglophones ont regardé la télévision sur leur tablette ou sur leur smartphone en 2013, soit deux fois plus qu’en 2012.
Cela dit, la télévision reste encore bien ancrée dans les usages : ainsi, 93% des canadiens ont regardé la télévision au moins une fois en 2013.
19% des canadiens anglophones et 4% des francophones sont aujourd’hui abonnés à Netflix, soit 8 points de plus au total qu’en 2012.
Le cord-cutting touche également le Canada, puisque le nombre de foyers canadiens abonnés à des services de télévision par câble, par satellite ou par IP est en légère baisse, de 85,6% en à 84,9% en 2013, soit une perte de 10 000 abonnés.
Des recettes en hausse, sauf pour la télé traditionnelle
Si les revenus de la télévision sont en hausse de 2009 à 2013, il faut surtout noter que la part des revenus des services spécialisés et payants, de pay-per-view et de VOD augmente par rapport à la part des revenus de la télévision traditionnelle.
Ainsi en 2013, les revenus de la télévision traditionnelle sont en baisse de 4,6% par rapport à 2012, tandis que ceux de la télévision payante, de pay-per-view et de VOD et des services spécialisés sont en hausse. Parce qu’ils tirent la majorité de leurs revenus de l’abonnement, les services payants, spécialisés, de pay-per-view et de VOD sont en outre moins dépendants de la publicité que la télévision traditionnelle, pour qui la publicité représente 90% de ses revenus.
Pour chaque dollar de recettes, 0,6 dollar a été réinvesti en contenu, pour des dépenses de programmation atteignant $ 4,1 milliards, dont $ 2,7 milliards de contenus canadiens (65%). Comme en France, la loi sur la radiodiffusion impose une contribution à la création canadienne.
Les services de vidéos en ligne représentent 50% des investissements de contenus
Les drames et les comédies sont les leviers d’audience principaux pour tous les services de télévision, que ce soit pour les services payants et spécialisés (43,2%) ou la TV traditionnelle (38,1%). Ces programmes concentrent logiquement la majorité des investissements de contenus.
Fait notoire, la télévision traditionnelle, privée comme publique, se désengage de la production de documentaires longs. Ce sont les services payants et spécialisés qui assurent le relais.
Le sport semble quant à lui être délaissé par la télévision traditionnelle privée comme publique, bien que 3 des 10 chaînes télé les plus lucratives soient consacrées au sport et que le sport reste le type de programmes le plus consommé (28,3%) sur le service public, SPR.
D’une manière générale, les services spécialisés investissent massivement dans les programmes, avec par exemple $200 millions pour les drames. Ils représentent aujourd’hui près de la moitié des dépenses de programmes.
Les chaînes de télévision privées misent quant à elle sur l’info (60% de leurs dépenses), le divertissement, ainsi que les drames et les comédies.
Les dépenses faites par les services de pay-per-view et de VOD sont quant à elles en hausse de 6,4% sur la période 2011-2013, pour un total de 17 millions de dollars en 2013.