Par Mathias Virilli et Etienne Cointe, Direction de la Prospective, France Télévisions
Le manque d’investissement conjugué à une cruelle désillusion serait-il le mal sportif français du moment? Quelques jours après la défaite de l’équipe de France en Coupe Davis ou le revers du XV de France face aux Pumas argentins, le Digital Sport Challenge 2014, qui étudie les usages des médias sociaux et la stratégie Internet des acteurs du sport, ne redore pas le blason français.
Recouvrant les ligues de football, tennis, basket, rugby et handball ainsi que 20 athlètes, 10 fédérations, 10 équipementiers, 10 évènements, 8 distributeurs, 8 médias en plus d'observer la consommation de sport via les médias numériques, cette étude de web assessment nous donne une vision à 360° de l’état de la présence du sport en ligne en France.
Les français consomment peu de sport sur Internet. La TV reste le média privilégié.
65% des Français suivent le sport. C’est peu si on le compare aux voisins allemand (77%) ou espagnol (82%). Les Français consacrent en moyenne 5h par semaine au sport, et seulement 37% fréquentent des événements sportifs (contre 72% en Turquie, par exemple). Parmi les sports suivis, le football arrive en tête (32%), devant le tennis (24%) et le rugby (22%).
Quant aux médias employés pour consommer du contenu sportif, 96% des Français qui suivent le sport citent la TV, qui reste le moyen le plus utilisé par tous les pays sondés.
En revanche, 50% seulement utilisent un ordinateur (65% chez les Espagnols, 71% chez les Russes), et 30% un appareil mobile (tablette ou smartphone). Avec l’Allemagne et le Japon, la France se situe de fait tout en bas du classement de la consommation de sport en ligne, loin derrière les Emirats Arabes Unis (86% en ligne, 74% sur mobile) et l’Inde (85% en ligne, 76% sur mobile). Les smartphones et tablettes apparaissent donc comme un levier de développement important de la consommation médiatique de sport en ligne en France, sachant que 57% seulement des fans de sport français souscrivant à un abonnement Internet ou mobile déclarent la qualité de diffusion satisfaisante.
Même constat pour les réseaux sociaux, que seuls 21% des Français fans de sport utilisent pour suivre le sport, comparé à 60% pour l’Indonésie, ou 38% pour le voisin italien. Facebook (79%) devance YouTube (52%) tandis que Google + et Twitter se partagent la troisième place (17%), laissant Instagram (8%) au pied du podium. Outre les réseaux sociaux nationaux, cette hiérarchie est majoritairement similaire dans les autres pays sondés. En termes de contenus, les fans de sports utilisent les réseaux sociaux pour regarder des vidéos des matches ou leurs résumés, mais aussi pour obtenir des informations sur une équipe ou sur un sportif.
Ainsi, avec seulement 53% des Français intéressés par le sport utilisant Internet pour le suivre, la consommation de contenu sportif sur Internet équivaut à 1h30 par semaine en moyenne.
Des acteurs français très disparates
L’étude nous révèle que la notoriété d’un sportif auprès du grand public n’est pas forcément synonyme de popularité sur les réseaux sociaux puisque seuls 2 sportifs se retrouvent dans tous les classements: il s'agit de Karim Benzema et Tony Parker.
Si le classement de la notoriété des sportifs se distingue par son hétérogénéité avec des acteurs provenant de tous horizons (football, basket-ball, natation, athlétisme, tennis et rallye), il en est autrement des classements relatifs à la popularité sur Facebook et Twitter. Ils démontrent une nouvelle fois la prédominance du football, qui place 9 de ses représentants dans chacun des top 10. Seul Tony Parker parvient à se tailler une place parmi les footballeurs tandis que Teddy Riner, pourtant sportif le plus connu selon l’étude, en est absent.
Afin d'analyser la performance des acteurs du sport sur le web et les stratégies déployées sur les réseaux sociaux, l'étude définit 6 catégories:
Les résultats diffèrent sensiblement des classements précédents. Le fait de pratiquer un sport individuel se révèle être un élément prépondérant. Les footballeurs sont très souvent dépassés par les joueurs de tennis notamment (Jo-Wilfried Tsonga et Alizé Cornet) qui ont clairement compris les enjeux que recouvrent le web et les réseaux sociaux.
Les clubs sportifs s’inscrivent davantage dans la réalité économique: les clubs de football occupent les premières places, suivies des écuries du top 14 puis des équipes de basket-ball de Pro A et des clubs de handball.
On observe des disparités dans le sport féminin: si les équipes féminines de football (Lyon, PSG, Montpellier) bénéficient indéniablement de l’attrait suscité par leurs homologues masculins présents en Ligue 1, aucune synergie ne semble exister au basket-ball par exemple.
En ce qui concerne les événements sportifs français, une réelle ligne de démarcation se dessine entre ceux d’envergure internationale (Roland Garros, le Tour de France et le Dakar) globalement bien structurés au niveau de leurs stratégies web et réseaux sociaux et les événements à portée nationale (Hand Star Game, Tournoi BNP Paribas…) qui n’obtiennent pas la moyenne.
La famille des distributeurs se distingue par une claire polarisation entre les groupes et les réseaux de magasins, pour lesquels il est difficile de partager une plateforme web performante. Les équipementiers, quant à eux, représentent le secteur le plus performant et le plus homogène dans cette étude avec des figures de proue tels qu’Adidas, Quicksilver ou Nike.
Pour les acteurs de la sphère sportive désireux de s’améliorer, l’étude donne les exemples à suivre dans chacun des secteurs. Il est donc conseillé à un sportif de visiter le site de Cristiano Ronaldo, à un club de football de se pencher sur le plan d’action de Manchester City ou à des organisateurs d’évènements français d’analyser la stratégie déployée sur le web et les réseaux sociaux pour le Super Bowl.