Presse : les clés du succès de la start-up De Correspondent

Par Barbara Chazelle, France Télévisions, Directions Stratégie et Prospective

Lancée en 2013 grâce à une campagne de crowdfunding, De Correspondent, la plateforme de journalisme en ligne sans publicité néerlandaise, compte désormais 32.000 membres (et vise 50.000 cette année) et une équipe de 24 personnes qui travaillent à plein temps sur le projet. Durant les Digital Media Strategies qui se tiennent à Londres cette semaine, Ernst-Jan Pfauth et Rob Wijnberg, les co-fondateurs, ont donné quelques clés de réussite de leur start-up dont pourraient très certainement s'inspirer quelques grands médias.

« From news to new »

La première spécificité de la plateforme est de se focaliser sur ce qui ce passe au quotidien autour de son public, sur les signaux faibles et donc finalement ce qui fait que notre société évolue.

« On voulait créer un nouveau produit. Mon job a été de redéfinir les news en quelque chose de nouveau » a expliqué Ron Wijnberg, co-fondateur et éditeur en chef de De Correspondent. « Les news vous parlent toujours de l'exception dans le monde, une banque qui fait faillite ou un politicien qui se retire de la vie politique, mais jamais des règles. »

Etre indépendant

La raison d'être de la campagne de crowdfunding était de garantir à la plateforme une réelle indépendance.

« Pas d'investisseurs, et pas de publicité sur le site. Si vous avez des annonceurs, vous transformez votre audience en cible. Nous n'avons pas besoin de faire ça, du coup, on peut se concentrer sur les besoins de nos lecteurs. »

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Avoir une approche centrée sur l'auteur

« Les journalistes sont la plateforme. »

Au sein de la start-up, ils ne sont d'ailleurs pas appelés « journalistes » mais « correspondants », dont l'un des rôles majeurs est d'être des leaders de la conversation avec le lectorat.

Pour les co-fondateurs de la plateforme, « celui qui raconte est tout aussi important que l'histoire qui est racontée ».

Les correspondants écrivent bien sûr des histoires mais rapportent aussi le processus qu'ils suivent pour y arriver, ce qu'ils ont trouvé, les questions que cela soulèvent...

Par ailleurs, les contributeurs sont aussi importants que les journalistes.

« Le problème avec le journalisme, c'est qu'on ne connaît pas nos lecteurs. On cherche des interactions, des commentaires mais ca s'arrête là. […] Les lecteurs sont une potentielle mine d'or d'experts, une source d'information […] On ne veut pas de commentaires ; on cherche des contributions », a précisé Ernst-Jan Pfauth.

Aussi parce que très vite, ces contributeurs deviennent des ambassadeurs via les médias sociaux.

Etre transparent (et généreux)

La confiance est au cœur de la relation, c'est pourquoi la start-up investit énormément sur le développement d'une relation personnelle entre les journalistes et les membres.

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Cela se ressent sur la stratégie marketing qui mise sur la transparence.

« Notre marketing c'est juste de montrer ce qu'on fait. » ont-ils déclaré.

Par exemple, les lecteurs occasionnels sont invités à donner leur adresse e-mail en échange de laquelle ils reçoivent un article gratuitement chaque semaine. Une stratégie qui semble être payante car De Correspondant enregistre un taux de conversion de 2,5% et 40 nouveaux membres par jour.

Tout est mis en œuvre pour ne pas créer d’interaction négative avec les lecteurs. Ainsi, les membres ont le droit de partager les articles qu'ils ont payé (à hauteur de 60 euros par an) avec ceux qui n'ont pas souscrit au service. Le bénéficiaire du partage recevra alors l'article complet avec la mention «  Cet article vous a été donné par XX ».

« Nous expliquons (aux lecteurs) que le journalisme de qualité doit bien être financé par quelqu'un. Beaucoup de personne adhèrent à cette idée et commencent alors à vous supporter. Si elles ne le font pas, elles ne l'auraient de toute manière pas fait avec des articles à visibilité restreinte. »

Chercher à se diversifier

Chez De Correspondent, « on n'a pas cherché de nouveaux business modèles, ils se sont imposés à nous ! »

Ainsi, en cherchant toujours à mettre en valeur leurs auteurs, la start-up a eu l'idée de monétiser la prise de parole des correspondants dans des conférences et autres évènements d'experts ou encore de publier eux-mêmes les livres de ces derniers. 10 000 copies (dont 30% de ebooks) ont ainsi permis de générer 40 000 euros de profit. Et de préciser que le prix des ebooks étaient bien moins chers que les tarifs pratiqués par les professionnels de l'édition, parce qu'après tout, les coûts de fabrication étaient minimes. Ces mêmes ebooks peuvent par ailleurs être envoyés par mails une fois payés, comme pour les articles !

« Si ce n'était pas si cher, on ferait des documentaires » ont conclu les co fondateurs. « C'est le développement logique du journalisme. »

Et en exclu pour Méta-Media, 3 conseils de Ernst-Jan Pfauth, et Rob Wijnberg pour tous ceux qui veulent donner un souffle frais au journalisme.