Par Emilie Balla, France Télévisions, Direction de la Prospective
Ce week-end, Méta-Media était au Zénith de Paris, qui s’est transformé en véritable arène de combat pour accueillir la deuxième édition de l’ESWC Call of Duty, la compétition mondiale d’eSport. Seize équipes internationales se sont affrontées tout le week-end à Call of Duty, le célèbre jeu de tirs sur consoles. Les gamers se sont retrouvés face à un public de supporters très engagés, certains venus de loin pour les soutenir. Retour sur un week-end riche en émotions et le point sur la réglementation française en vigueur en matière de sport électronique.
Une compétition d'e-sport, ça ressemble à quoi ?
Lorsqu’on pénètre dans l'antre de la compétition, on est saisi par chaleur, perdu dans le jargon de gamer en franglais et tout aussi interpellé par l'engouement impressionnant de fans qui brandissent des banderoles. Sur scène ce ne sont pas des stars du rock mais les pros de la console qui entrent en action, des jeunes hommes âgés de 17 à 24 ans. Les matchs d’eSport Call of Duty sont rythmés par les tirs de fusils d’un côté, de l’autre par les cris, les applaudissements ou les hués de spectateurs, les yeux rivés sur l'écran géant. On se croirait dans un stade. Le sport électronique, rappelons-le, voit s’affronter virtuellement des équipes de gamers, casques sur les oreilles et manettes à la main.
Lors d'une compétition de Call of Duty, une équipe est composée de 4 personnes face à leurs écrans et soutenue par leur coach debout derrière eux. Pendant les manches, d’environ 5 minutes chacune, les joueurs ne communiquent quasiment pas entre eux, car la concentration est à son maximum. L’important est de garder son calme face à la pression et la rapidité du jeu. Les missions à accomplir diffèrent selon les modes de jeu, et les lieux appelés des maps. Il peut s’agir de récupérer le drapeau adverse et le rapporter dans son camp sans se faire tuer, de poser une bombe dans une usine désaffectée, ou d’anéantir le maximum de soldats ennemis dans une forêt.
Est-ce vraiment un "sport"?
L’ambiance, les sponsors, les communautés de fans qui suivent depuis des années, tout y est. Si on a l’impression d’être face à des geeks devant leurs consoles, pour les fans de Call of Duty, pas de doute, c’est un sport à part entière. Les parties d’esport se gagnent grâce à des tactiques et une stratégie très précise, où chaque gamer a son rôle à jouer, rien à voir avec un jeu de hasard. C’est un vrai mode de vie, car la préparation avant chaque tournoi est intensive, et repose sur des heures d’entraînements et de simulations en équipe et en solitaire.
Les spectateurs, eux aussi majoritairement masculins et jeunes peuvent suivre les matchs projetés sur un écran géant et commentés par les professionnels de l’esport, Jonas Ferry (@_oxygenJF) et Olivier Morin (@Olivermo), ainsi que des YouTubers stars, tels que Zakaria Haddad (@Zack_Nani), Anil Branca (@WaRTeK) et Raphael Allouche (@Zydar27) là pour meubler pendant les problèmes de connexions. Dimanche, le favori OpTic Gaming, la team américaine a remporté le tournoi face aux anglais de Splyce, repartant avec leur trophée ainsi qu’un chèque 20.000 $.
e-sport a désormais un statut en France
De plus en plus populaire dans l'hexagone, l'eSport dominé par les Etats-Unis et l'Asie, vient récemment d'obtenir un statut en France. De plus en plus lucratif aussi, puisque l'esport aurait généré 194 Millions d'euros de revenus en 2014, montant qui devrait doubler d'ici 2017. Il y a quelques temps encore, ces compétitions d’esport organisées avec des gains financiers, étaient considérées comme des loteries laissant la place au hasard et non pas à la stratégie. Mais depuis le 3 mai dernier, les tournois de jeux vidéo sont officiellement reconnus par la France, dans le cadre du projet de loi pour une République numérique, lancé par Axelle Lemaire secrétaire d’Etat chargée du numérique.
L’article 42 de ce texte vise ainsi à encadrer les compétitions d’esport. Le but étant de reconnaître l’adresse, l’endurance et l’intelligence des joueurs professionnels, qui auront à présent un vrai statut social, et de sécuriser juridiquement l’organisation des compétitions. Cela permettra également d’encourager le développement de cette activité, qui ne compte pas loin de 850 000 adeptes dans le pays.
Une différence est toutefois faite entre les compétitions réelles avec la présence physique des gamers et les tournois en ligne, ces derniers n'étant pas autorisés s’il y a une compensation financière à la clé. Si les députés en charge du projet plaident en faveur de ce projet de loi car ils redoutaient des dérives, notamment concernant le dopage ou les trafics d’argent en ligne, le secteur du jeu vidéo semble lui divisé entre envie de reconnaissance et crainte de taxation de la part du gouvernement.