CES 2022 : La tech se rue sur le métavers

Par Kati Bremme, Direction de l’Innovation et de la Prospective

Au CES 2022, "les métavers métaversent les métavers", a titré TechCrunch pour se moquer de l’un des buzzwords du CES 2022. A côté des thématiques classiques (5G, IA, AR, VR, XR), NEXTGEN TV, maisons et villes intelligentes, sport, santé, robotique, voitures gadget), le CES 2022 a en effet misé sur des tendances du moment et du futur : Food Tech, NFT, cryptomonnaies, Métavers et même Space Tech.

Si beaucoup de grands groupes (dont Google, Intel, Mercedes et Meta) ont déserté les allées de l'événement à la dernière minute, la faute à Omicron, ces derniers ont laissé la place à des entreprises de moindre envergure mais pas moins innovantes. La French Tech y était présente avec 140 start-ups. L’absence des grands groupes a peut-être même créé un salon plus harmonieux, les décideurs politiques partageant les scènes du CES avec des startups et des entrepreneurs, et non pas avec les géants de la tech qu'ils sont en train de démanteler.

Dans une ambiance "The Show Must Go On", après l’échec de la version virtuelle du CES 2021, les technologies présentées étaient plus ou moins utiles. D’un côté, The Loop d’Elon Musk censé désengorger les rues de Las Vegas (et éviter les mille pas aux visiteurs qui vont d’un hôtel à l’autre pour suivre les conférences) a créé des bouchons souterrains, de l’autre côté de véritables améliorations sur des technologies qui seront réellement commercialisées ont été révélées cette fois-ci, ce qui n'est pas toujours le cas au CES.

The Boring Company

En pleine pandémie, l'industrie technologique se porte bien, poussée par la forte demande de smartphones, de technologies automobiles, d'appareils de santé et de services de streaming. Selon l'association Consumer Technology Association (CTA), qui organise le salon, le chiffre d'affaires de la branche a augmenté de près de 10% l'année dernière aux Etats-Unis pour atteindre 491 milliards de dollars, et on s'attend pour la première fois à plus de 500 milliards de dollars en 2022. Cette bonne évolution se reflète également à la bourse, Apple a dépassé en plein CES pour la première fois le seuil des 3000 milliards de dollars de capitalisation boursière.

Le salon reste une boule de christal qui sert à regarder l’avenir, un outil pertinent pour détecter des tendances qui n’arriveront peut-être que dans quatre ans (voire jamais) dans les magasins. Voici un résumé des tendances traditionnelles et nouvelles du CES 2022, suivi en ligne par Méta-Media.

La santé d’abord

La pandémie n'a pas seulement eu un impact sur le nombre de participants. Elle a fait des produits liés à la santé et au bien-être une priorité encore plus importante que les années précédentes. Pour la branche bien-être, McKinsey prévoit une valorisation du marché mondial de 1,5 milliard de dollars. La pandémie a accéléré la tendance de l'automédication et la concentration sur le bien-être personnel comme base d’une bonne santé.

La popularité des appareils de fitness à domicile basés sur la technologie a aussi grimpé en flèche. Environ 1,5 million d'appareils d'exercice connectés ont été livrées en 2020. En 2021, ces appareils franchiront le cap des deux millions (soit une hausse de 43 %) et rapporteront 3,9 milliards de dollars (soit une hausse de 40 %), selon le CTA Market Research.

Le succès du vélo connecté de Peloton pendant la pandémie a inspiré la concurrence. Le rameur de Hydrow et son écran de 22 pouces offrent des cours en direct ou enregistrés, et vous transportent sur le lac de Lucerne ou sur l’eau turquoise de Miami. Xsens Technologies, de son côté, utilise sa technologie et ses produits de suivi du mouvement en 3D pour changer la donne dans le sport.

Des entreprises comme Abbott, AT&T Business, Omron Healthcare, Sleep Number et Revival Health ont présenté des outils de diagnostic et surveillance à distance des patients, thérapeutique numérique, santé mentale, wearables et télésanté. Des innovations directement liées à la pandémie étaient aussi sur le devant de la scène.

LOD Protect, une start-up lyonnaise, a montré une lampe destinée à rendre inoffensifs les virus et les bactéries présents dans l'air. Elle aspire l'air, le nettoie de ces particules indésirables dans un “tunnel de désinfection” à l'aide de rayons ultraviolets et les rejette ensuite, à l’instar de la solution de purificateur d’air de Valeo. L'entreprise parle même d'une "vaccination par l'air". AIRXCÔM, autre start-up lyonnaise, a présenté un masque qui, selon un principe similaire, est censé détruire les virus grâce à un rayonnement UV. Légèrement encombrant et au prix de 400 euros, il semble cependant loin de devenir un outil grand public.

Avec sa balance connectée Body Scan et ses accessoires, les Français de Withings promettent une véritable "station de santé connectée". Par un lien sécurisé (grand enjeu de la technologie de santé connectée), il sera possible de partager ses données avec son médecin. De son côté, le système de surveillance continue du glucose (CGM) FreeStyle Libre d'Abbott a changé la vie de près de 3,5 millions de personnes dans plus de 50 pays en offrant une technologie révolutionnaire accessible et abordable. Abbott est d’ailleurs la première entreprise de Santé qui a fait l’objet d’une table ronde dédiée au CES 2022, signe de l’importance de la thématique.

Google s'appuie sur l'image de marque et la vaste expertise de Fitbit. Avec ses services d'abonnement Health et Health Plus, Fitbit est en train de passer du statut de fournisseur de matériel à celui de véritable créateur de mode de vie.

Dans une toute autre dimension, Neutonica Band, un masque connecté, a été imaginé par un garçon méxicain de 8 ans qui n’arrivait pas à dormir. Lili for Life, start-up rennaise, présente une lampe qui aide les dysléxiques à la lecture, en émettant des flashs lumineux, quasiment imperceptibles à l'œil nu, qui rendent la perception de l'écrit plus préciseLa start-up française MyEli a remporté un Innovation Award pour son bracelet de défense connecté, qui alerte l'entourage de son porteur en cas de harcèlement de rue, violence, chute ou malaise.

Parfois, une technologie utilisée pour une chose se trouve aussi une destination toute différente. C’est le cas des capteurs SoundSee qui combinent l'IA et l'IoT (Internet des Objets). Depuis fin 2019, ils voyagent dans l'espace pour identifier les sons inhabituels sur l'ISS, en utilisant des algorithmes d'IA pour analyser et indiquer quand une maintenance est nécessaire. Aujourd'hui, en collaboration avec la société de soins de santé à but non lucratif Highmark à Pittsburgh (États-Unis), Bosch utilise cette technologie pour étudier comment l'IA audio peut aider la médecine pédiatrique, notamment pour détecter l’asthme. Hypnoledge veut désormais commercialiser son application d'hypnose, d'abord conçue pour l'apprentissage des langues, comme un outil de bien-être mental. De son côté, Dassault Systèmes, reconnu pour sa maîtrise des secteurs de l’automobile et de l’aérospatial, veut modéliser le corps humain, en commençant par le cœur.


Dassault Systems, Consumer Technology Association

Les écouteurs Apple, Sennheiser (acquis par Sonova) et Bose servent aussi d’appareils auditifs.   

Les humains n’ont d’ailleurs pas le monopole de la santé. Le collier Catlog fait office de tracker d’activité pour chat, et iPetWeaR, lauréat de prix de l'innovation du CES 2022, est un dispositif portable qui suit les données de santé des chiens et chats, notamment leur rythme cardiaque, leur respiration et leur activité, et alerte le gardien de l'animal en cas d'anomalie. 

Bienvenue dans l’Uncanny Valley

Le CES 2022 a aussi été l’occasion de croiser des robots qui nous transportent directement dans la "vallée de l’étrange" théorisée par le roboticien japonais Masahiro Mori dans les années 1970. Selon Mori, plus un robot androïde est similaire à un être humain, plus ses imperfections nous paraissent monstrueuses. Et c’est bien le cas du robot humanoïde Ameca d’Engineered Arts, combinaison d’AI (Artificial Intelligence) et d’AB (Artificial Body).

Ses créateurs remarquent d’ailleurs que "quand il apparaît moins comme un humain, les gens l’aiment beaucoup plus". La série Ameca présente des avancées en matière de mouvements et de gestes naturels, d'interaction "intelligente", ainsi qu'un système logiciel à l'épreuve du temps conçu pour exploiter l'intelligence artificielle et la vision par ordinateur avec un apprentissage adaptatif.

La présentatrice de la télé coréenne Arirang, Moon Connyoung, a rencontré pour la première fois son double IA au CES 2022, développé avec DeepBrain AI. On y a aussi croisé des chefs de cuisine robots dextres (Moley Robotics), une poupée robot pour s'entraîner au premier secours (Pedia-Roid), un robot rassurant contre l’anxiété (Amagami Ham Ham) ou encore un chien robot danseur (Spot). LG a présenté le dernier-né de sa série de robots autonomes CLOi, notamment un système de livraison à quatre roues qui utilise l'intelligence artificielle pour manœuvrer sur différents terrains. Les robots Caddie et Retriever, quant à eux, sont au service des personnes à mobilité réduite.


credit: Yukai Robotics

Autres cas d’usage pour l’IA

En combinant les trois disciplines de l'IA, du ML (Machine Learning) et du DL (Deep Learning), les ordinateurs peuvent apprendre efficacement à partir d'exemples et construire des connaissances. Ils peuvent reconnaître des objets, comprendre et répondre à un langage naturel verbal, s'attaquer à des problèmes insolubles et même prendre des décisions que les humains pourraient considérer comme rationnelles et perspicaces.

Erin Kelly, PDG d'ASI, a dévoilé, pour la première fois au CES, un nouveau produit d'IA appelé AskPolly qui rend la modélisation prédictive de la demande des consommateurs aussi facile à utiliser qu'une interface Google. AskPolly utilise la modélisation des conversations pour mieux comprendre le processus décisionnel des consommateurs. Cette IA peut être utilisée par les journalistes, les professionnels des relations publiques et les responsables de la publicité pour tester les messages, suivre les tendances, cartographier les parcours des clients et bien plus encore.

Côté industrie audiovisuelle, DeepBrain AI a présenté sa solution AI Studios Script to Video. AI Studios est un outil de production vidéo qui permet de produire facilement des vidéos sans avoir besoin de filmer ou d'employer les personnes réelles en combinant AI Studios de DeepBrain sous forme de SaaS (logiciel en tant que service) et un ordinateur.

Presque tous les produits technologiques grand public que nous verrons en 2022 seront plus intelligents, plus intuitifs, et peut-être même plus conversationnels. "En ajoutant l'intelligence artificielle et l'apprentissage automatique aux appareils et en attachant des services au matériel dans les maisons, les entreprises étendent les capacités de surveillance aux consommateurs au-delà des points d'accès standard", observe Elizabeth Parks, présidente de Parks Associates.

Les objets intelligents doivent se parler 

Matter est un protocole créé par la Connectivity Standards Alliance (CSA), anciennement connue sous le nom de Zigbee Alliance, qui devrait rendre tous les appareils de la maison intelligente interopérables, quel que soit leur écosystème clos. Le concept est presque impossible à envisager : Amazon, Apple, Google et Samsung décidant tous de jouer franc jeu les uns avec les autres.

Kevin Collins, directeur général du secteur des logiciels et des services de plateforme d'Accenture remarque à ce sujet : "[...] il est clair que le marché de la maison connectée a désespérément besoin de l'émergence d'une ou deux normes."

Convertir Amazon, Apple, Google et Samsung à l'interopérabilité est déjà un défi. Mais la CSA doit aussi convaincre les fournisseurs d'appareils et de services tiers, et finalement les consommateurs, que Matter "matters" (est important). Cela prendra encore un peu de temps. A propos de l’IoT, l’intelligence "edge" (au sein du device et non pas dans un cloud) a aussi fait un pas en avant avec les nouveaux processeurs mobiles Intel Core série H de 12e génération, les processeurs mobiles les plus rapides jamais créés.

Google, de son côté, avait annoncé "Better Together", et a montré un intérêt pour Windows et pour les interactions croisées entre le système de Microsoft et Android. L’éditeur travaille sur des technologies pour fluidifier les scénarios d’interconnexions des smartphones et des PC. Vraisemblablement, Google va passer 2022 à essayer d'égaler les intégrations de l'écosystème d'Apple.

Interopérabilité : du gaming au métavers

Pendant des années, le secteur des jeux a été dominé par les ordinateurs. Si l'achat de jeux à l'unité reste un secteur important, on assiste aujourd’hui à une augmentation du nombre de jeux gratuits, d'achats dans l'application et de services d'abonnement. Comment les sociétés de jeux vidéo se disputent-elles l'attention des consommateurs (et leur argent) ?

La convergence des jeux est un concept lucratif et central pour les éditeurs, car elle unifie tous les consommateurs, les rassemblant en un seul endroit. Elle ouvre un nouveau monde d'engagement, les joueurs étant libérés des contraintes de l'appareil. Ils peuvent choisir la plateforme qui leur convient selon la situation. Plus important encore, ils peuvent choisir de jouer "on the go". Le pouvoir des réseaux entre également en jeu. Les joueurs peuvent se connecter avec des amis qui possèdent peut-être une plateforme concurrente. Par conséquent, les éditeurs ont accès à un public de joueurs plus large, et à leur porte-monnaie.

L'écosystème existe déjà. Des jeux comme Fortnite, Rocket League et Minecraft permettent aux utilisateurs de jouer sur différents appareils, et ces marques commencent à toucher du doigt les éléments constitutifs d'un métavers. 

La tech pour le métavers

Après les télés 3D ou la maison connectée, voici donc le métavers. Si au CES 2022, le métavers s’est un peu rapproché de la réalité, à travers la présentation de différents objets physiques qui permettront d’y accéder avec plus ou moins de confort, il y avait aussi beaucoup de buzz pour rien, rassemblé dans ce thread par un des participants :

"Qu'est-ce que le métavers si on ne peut pas le ressentir ?", s'interroge justement Jose Fuertes, fondateur de la startup espagnole Owo, qui a fabriqué une veste dotée de capteurs pour entrer dans le métavers. Le gilet Owo, actuellement testé avec des jeux vidéo, utilise la technologie haptique pour délivrer des vibrations qui simulent plus de 30 sensations différentes qu'un avatar en ligne peut éprouver. 


Un participant essaye le casque de réalité virtuelle Shiftall Megane X et son microphone pour des expériences métavers 

Shiftall, filiale de Panasonic, se targue de fournir des "produits idéaux pour les citoyens du métavers". La société a présenté à Las Vegas des lunettes VR et un appareil appelé "Mutalk", qui se place sur la bouche. Il peut transmettre des ordres vocaux à un ordinateur via Bluetooth, mais a également pour effet d'atténuer le volume de la voix vers l'extérieur et de la rendre moins gênante pour l'entourage. Le PebbleFeel, un harnais qui se porte sur le dos, permet de ressentir le chaud et le froid. Les sensations haptiques étaient en effet parmi les grandes innovations du CES. 

OVR Technology ajoute l’odorat à la réalité virtuelle, avec des cartouches olfactives recréant des dizaines de senteurs, comme du bois qui brûle ou un marshmallow rôti. Les Français d’Actronika vont lancer en mars, via Kickstarter, leur veste haptique Skinetic qui promet de ressentir des sensations, de l’impact d’une balle aux gouttes de pluie.

Face à ces appareillages, on a du mal à s’imaginer l’adoption du futur métavers par le plus grand nombre. Mais Oculus était l'application la plus téléchargée aux États-Unis le jour de Noël selon App Annie, un chiffre qui "s'appuie sur la tendance croissante des métavers et des expériences immersives." Et les appareils se font de plus en plus petits et sophistiqués. TCL LEINIAO AR a présenté les premières lunettes AR à micro-LED (guide d'ondes optiques holographiques) et Apple (AAPL), a prévu de lancer un casque de réalité augmentée dans le courant de l'année, même s'il n'est pas destiné au métavers.

Microsoft et Qualcomm ont annoncé aux CES des puces de réalité augmentée personnalisées qui seront utilisées dans les futures lunettes AR légères. NVidia a complété sa gamme de processeurs graphiques, mais s’est aussi positionné sur l’écosystème du métavers qui, outre de puissants GPU, aura besoin de créateurs d’univers virtuels. Justement, la société a profité du CES pour annoncer une version gratuite de son Omniverse destinée aux créateursLa start-up israélienne Wearable Devices de son côté, travaille sur un bracelet qui détecte les signaux électriques envoyés par le cerveau à la main. Le porteur peut contrôler les objets synchronisés d'un simple claquement de doigts - une fonction utile si des personnes utilisent des lunettes de réalité augmentée et doivent sélectionner des éléments affichés sur les verres.

Sony a confirmé le nom de son prochain casque VR : le PlayStation VR2. Samsung s’est allié à la plateforme ZEPETO afin de créer My House, un métavers qui propose la plupart des activités désormais classiques pour ce type d’univers virtuel : le travail collaboratif, les réunions et zones de chat, le jeu vidéo, la décoration/customisation de sa maison virtuelle, etc. Il sera bien-sûr aussi possible de tester des produits Samsung virtualisés. 

Paris Hilton ne s’est finalement pas rendue au CES pour la keynote "NFT, WTF ? ! ? !". La star, qui se considère comme une "iconic crypto queen", s’était lancée rapidement dans le business juteux des NFT et du métavers, en créant son île virtuelle "Paris World" sur Roblox.

La société Touchcast, de son côté, a présenté MCity, une plateforme de collaboration entre entreprises en réalité virtuelle, avec des adresses ".metaverse" semblables aux adresses web .com. Les domaines seront enregistrés sur une base de données blockchain, et non sur des serveurs.

Travailler dans le métavers 

Le métavers trouve aussi ses applications dans le domaine professionnel : Les travailleurs portant les lunettes de sécurité à réalité augmentée Vuzix Shield peuvent recevoir et envoyer des données et des vidéos. L'entreprise de Rochester, dans l'État de New York, a également remporté le CES Innovations Award et a récemment conclu un accord avec Verizon pour fabriquer des lunettes permettant de diffuser le sport et des jeux en réalité augmentée via la 5G. HTC a présenté sa gamme complète de casques de réalité virtuelle, dont beaucoup sont également destinés à des applications industrielles. 

Toute une série de startups proposait des plateformes pour des réunions virtuelles, des salons professionnels virtuels et d'autres événements virtuels. MeetKai par exemple travaille sur une plateforme de métavers d'IA conversationnelle - un monde où vous pouvez vous promener sous la forme d'un avatar et mener des conversations significatives avec des personnes fictives.

Capture MeetKai

Emma Chiu, Global Director à Wunderman Thompson Intelligence, et Georgina Wellman Stevenson, VP Business Development à Sine Wave Entertainment, se sont interrrogées sur le futur du travail dans le métavers à l'occasion d'une table ronde. Faut-il apprendre de nouvelles compétences juste au moment où l'on a à peine compris comment partager un écran sur Zoom ? Même si elles n'attendent un "pic du métavers" que dans 30 ans, le terrain semble fertile pour une adaptation plus large de la sociabilité virtuelle professionnelle.

L'étude de marché du CTA montre que les envois de lunettes XR (réalité augmentée (AR) et réalité virtuelle (VR) combinées) aux États-Unis vont plus que quadrupler entre 2021 et 2025. Le CTA prévoit également que les dépenses des consommateurs en logiciels de jeux passeront de 47,6 milliards de dollars en 2021 à 59 milliards de dollars en 2025.

Source : IDC

Enfin, Samsung a même annoncé des téléviseurs capables d'afficher des NFT. Quel meilleur endroit que le métavers pour voir des NFT selon Emma Chiu ? Étant donné que de nombreux promoteurs de métavers vantent la dimension cryptographique/Web3 de leur projet de construction du monde, tout ce qui rend les objets virtuels plus visibles en de multiples endroits pourrait accélérer leur adoption.

Reste à Meta (Facebook), Apple, Google et Microsoft et tous les autres à proposer des expériences sécurisées dans ce métavers : le harcèlement et les agressions sexuelles n’ont pas attendu pour conquérir cette nouvelle réalité.

Pour le meilleur des mondes et au-delà

Et si un jour, nous en avons assez du métavers et des NFT (dont l'impact écologique aura peut-être fini par détruire définitivement la terre), le CES a également une solution sous la forme de la Space TechL'économie spatiale devrait atteindre près de 1 000 milliards de dollars au cours des prochaines décennies, contre 340 milliards en 2019, selon le UBS Chief Investment Office. Alors que l'excitation se concentre sur les voyages dans l'espace, il existe d'autres opportunités en plus du tourisme, notamment le déploiement de réseaux de satellites nécessaires pour satisfaire la demande de bande passante des voitures autonomes et d'autres objets connectés à Internet, l'exploitation des matières premières des astéroïdes et les usines dans l'espace.

Le tourisme spatial n'est plus une dystopie. Lessives pour astronautes ou médicaments issus d'une imprimante 3D - on a trouvé de nouvelles solutions pour vivre dans l'espace au CES de Las Vegas. La société spatiale Sierra Space promeut même un modèle d'affaires "l'espace en tant que service" qui s'appuiera sur des technologies de pointe, comme les mini-navettes spatiales Dream Chaser® et les habitats extensibles LIFE.

Les participants au CES pouvaient se promener autour du Dream Chaser de 30 pieds de long (malheureusement pas à l'intérieur) et de sa "remorque", le Shooting Star. Ensemble, les deux engins peuvent transporter des charges utiles de plus de six tonnes vers la station spatiale internationale ou vers le module Life Habitat, également exposé. Les habitants de LIFE seront apparemment très productifs, avec de la place pour faire de l'exercice sur des équipements, fabriquer des robots, cultiver leurs propres produits et compacter leurs déchets en briques pour les utiliser comme protection contre les radiations.

En attendant le voyage vers d'autres galaxies, l'entreprise Zero G offre une expérience d'apesanteur semblable à celle de l'espace, sans la vue planétaire. Son Boeing 727 G-Force One modifié effectue des paraboles pour créer 15 périodes distinctes de 20 à 30 secondes d'apesanteur. Les vols commerciaux zéro G coûtent 7 500 $ chacun, et des charters de groupe sont également disponibles. L'entreprise française Air Zéro-G propose la même chose au départ de Bordeaux, cette fois-ci dans un Airbus A 310 modifié.

Le futur de la mobilité électrique intelligente

Il y a deux ans, le groupe japonais Sony créait la surprise à Las Vegas avec la voiture électrique "Vision-S". A l'époque, Sony n'avait pas précisé si ce véhicule était destiné à être testé pour la vente de la technologie Sony ou s'il s'agissait d'un premier pas vers la production automobile. Lors du CES 2022, Sony en a dit un peu plus : "Nous explorons un lancement commercial des voitures électriques de Sony", a déclaré son président Kenichiro Yoshida à la fin de sa présentation. "En tant qu'entreprise de divertissement créative, Sony est bien placée pour redéfinir la mobilité". Dès le printemps, l'entreprise qui a grandi avec les radios à transistors et les téléviseurs couleur, puis avec le Walkman et la Playstation, veut créer la filiale Sony Mobility. La chasse à Tesla est ouverte.

Du côté des constructeurs automobiles "historiques", Mercedes-Benz a dévoilé sa Vision EQXX, une voiture électrique alimentée par l'énergie solaire qui, selon le constructeur allemand, peut parcourir plus de 1000 kilomètres en une seule charge. Chez BMW, la voiture concept iX peut changer de couleur pour une personnalisation poussée à l'extrême, selon l'humeur du jour, et accessoirement une meilleure gestion de l'énergie. Toyota a annoncé que sa marque Lexus serait tout électrique d’ici 2035, Chrysler prévoit de faire ses adieux au moteur à combustion en 2028, et General Motors a présente une camionnette électrique.

Les voitures 100 % autonomes se font encore attendre, mais la course à la voiture intelligente fait déjà les affaires du fabricant de puces Nvidia, qui a signé des partenariats avec Mercedes, Volvo, Audi et Hyundai. John Deere commercialisera fin 2022 un tracteur 100 % autonome, capable de labourer et moissonner, une nouvelle révolution agricole, 12 000 ans après celle du Néolithique.

2022 est aussi l’année des LIDARS (Laser Imaging Detection And Ranging) – composant essentiel des voitures autonomes. Le français Valeo a présenté deux lidars de nouvelle génération à Las Vegas cette année (de longue et courte portées), face à une multitude d’autres producteurs, comme le chinois Robosense, qui équipe des marques chinoises dont le géant du web Alibaba.

En ce qui concerne les véhicules électriques à décollage et atterrissage vertical ou eVTOL (Electric Vertical Takeoff and Landing aircraft), nous sommes loin de l’adoption générale : Uber, en quête de rentabilité, a depuis longtemps vendu sa division de taxis volants Uber Elevate à Joby Aviation, même si la société ne met pas complètement de côté le dossier des véhicules volants, et nous sommes sans nouvelles des taxis volants pour les JO de Paris. 

La 5G au service de la réalité augmentée

Le nombre de téléphones 5G vendus ainsi que les réseaux 5G disponibles devraient dépasser 50 % en 2022, ce qui justifiera le développement et l'adoption d'autres applications et appareils 5G. "Les réseaux 5G devraient profiter aux industries des villes intelligentes, des infrastructures, de l'éducation et de la santé numérique", note Rick Kowalski, directeur de l'analyse et de la veille économique du CTA.

De la télémédecine à la télé-éducation, en passant par le divertissement, la 5G accélère l'innovation. Le plus grand changement que la 5G pourrait apporter concerne les réalités augmentée et virtuelle. Alors que les téléphones se transforment en appareils destinés à être utilisés avec des lunettes AR, la très faible latence et les vitesses élevées de la 5G permettront de créer un monde augmenté avec une abondance d'informations provenant d'Internet. Les aspects "petites cellules" de la 5G peuvent contribuer à la couverture des bâtiments, les routeurs domestiques devenant également des sites cellulaires.

Les réseaux 5G fourniront la connectivité robuste nécessaire pour répondre aux besoins massifs en MIMO (entrées multiples, sorties multiples) du métavers. Les environnements d'informatique en cloud sont un élément central de l'exploitation du métavers, de même que les dispositifs de calcul de périphérie, y compris le matériel AR/VR, les vêtements haptiques, les caméras, et une foule d'autres capteurs et dispositifs d'entrée. La vidéo volumétrique sera une construction clé dans le métavers. La réalisation de films volumétriques combine l'art du cinéma avec le jeu vidéo en utilisant des algorithmes avancés pour rendre des images interactives en trois dimensions.

Nouveaux écrans pour le télétravail 

A côté des formats multiples d'écrans de plus en plus grands dans les voitures connectées et autonomes - BMW a même inventé le "cinéma dans la voiture" avec l'écran 8K "Theater Screen" (pour les passagers arrière) - les écrans à la maison se diversifient.


BMW Theater Screen

Alors que l'industrie attendait la sortie du premier téléviseur QD-Oled de Samsung, c'est finalement Sony qui commercialisera le premier modèle de ce type, pourtant équipé d'une dalle Samsung Display. En attendant la même technologie sur les écrans de Samsung, les derniers téléviseurs Frame du chaebol coréen sont dotés d'un écran mat qui ressemble encore plus à de l'art véritable. LG, de son côté, annonce ses téléviseurs OLED les plus grands et les plus petits de tous les temps dans le cadre de sa gamme 2022.

Les écrans deviennent aussi de véritables entreprises de divertissement, des nouveaux téléviseurs de Samsung, qui proposent Nvidia GeForce Now et le jeu Google Stadia, aux (déjà évoqués plus haut) écrans Samsung qui intègrent des NFT. Les téléviseurs Lifestyle de LG peuvent aider à transformer une maison en bureau, salle de sport, galerie, atelier ou centre de divertissement (avec une fonction "watch-together"), tout en rehaussant le décor et en rendant la vie quotidienne plus agréable, et le Samsung Odyssey Ark est un écran incurvé que vous pouvez faire pivoter de 90 degrés pour qu'il passe au-dessus de votre tête pour une immersion complète.

Le petit vidéoprojecteur FreeStyle présenté par le Samsung Future Generation Lab, une entité de Samsung qui se concentre sur les usages des jeunes générations, a déclenché des réactions positives. Le Freestyle semble en effet être le compagnon idéal des vidéos TikTok, (mais peut-être moins de votre collection de Blu-ray).

Côté industrie des smartphones (qui attend plutôt le Mobile World Congress à Barcelone pour les grandes annonces), on a quand même vu quelques nouveautés au CES, comme les smartphones coulants et pliants de Samsung. Pour rester dans l'origami, Asus lancera cette année un ordinateur portable OLED pliable de 17 pouces.

Un total de 500 millions de souscripteurs de vidéo à la demande par abonnement (SVoD) ont été ajoutés depuis la fin de l'année 2019, ce qui met en évidence la façon dont le comportement de streaming premium s'est accéléré ou a été réintroduit aux quatre coins du globe. Les portefeuilles de services de streaming vidéo des consommateurs côtoient une nouvelle vague de services AVoD tels que Pluto TV, notamment aux États-Unis, ainsi que les services de VoD des diffuseurs (BVoD) comme le BBC iPlayer en Europe. Avec le lancement de nouveaux services de vidéo en continu, le paysage va continuer à se fragmenter de plus en plus en 2022, tout comme la consommation vidéo des ménages. Afin d'offrir des expériences de visionnage sans faille sur ces nouveaux écrans, le sujet des super agrégateurs dans tous les modèles économiques différents devient plus important que jamais. Avec les plus grandes entreprises de médias et de technologie qui prétendent toutes être le super agrégateur ultime.

Une tech responsable

Les gouvernements et les entreprises répondent à la demande des consommateurs, qui souhaitent une plus grande responsabilité environnementale, notamment dans la manière dont les appareils sont fabriqués, les matériaux utilisés et même la façon dont ils sont emballés. "Les consommateurs sont de plus en plus conscients de la nécessité de soutenir les entreprises durables, surtout chez les millennials / Génération Z et les personnes aisées", affirme Ross Rubin, analyste principal chez Reticle Research.

Les "viandes" à base de plantes, les expériences d'épicerie alimentées par l'IA, les aliments imprimés en 3D, les fermes verticales, les cuisines fantômes et les applications de livraison plus intelligentes sont tous en train de remodeler l'industrie alimentaire. Impossible Foods, qui a changé la donne dans la catégorie des viandes à base de plantes grâce à son Impossible Burger, accélère le développement de ses produits de nouvelle génération, notamment des substituts à base de plantes pour le steak, les fruits de mer, le poulet, le lait et les œufs. L'entreprise est désormais évalué à plus de 4 milliards de dollars, et ses substituts de viande sans animaux sont disponibles dans les grandes chaînes, notamment Burger King et Starbucks.

Partenariat Impossible Foods et Starbucks

De plus en plus de partenariats se mettent en place pour pousser la RSE. Samsung ne plante pas que des arbres dans le métavers, l'entreprise a également planté des arbres dans le monde réel. Elle s'est récemment associée à Veritree, une plateforme de restauration du climat basée sur la blockchain Cardano, pour gérer la plantation de deux millions d'arbres à Madagascar d'ici le premier trimestre de cette année. Acer s'associe à National Geographic pour proposer des ordinateurs écoresponsables.

Après deux ans de pandémie mondiale, les tendances phares du CES se concentrent essentiellement autour des technologies Santé et Bien-Être, et même les autres technologies sont axées autour de la notion de "confort". Le tout avec une conscience de plus en plus grande de l'impact sur l'environnement de toutes ces technologies plus ou moins utiles pour le futur de l'humanité.