SXSW 2022 – Les créateurs à la conquête du Web3

Par Kati Bremme, MediaLab de l'Information

South by Southwest était marqué cette année par la présence des créateurs, mélangés à des geeks de la blockchain, et des investisseurs qui comptent bien tirer profit de la ruée vers l'or du Web3. Il était difficile d'échapper à l'influence de la cryptomonnaie, présente à chaque coin de rue à travers d’innombrables affiches et expériences qui permettaient de se transformer en avatar 3D que l’on pouvait ensuite monnayer sur une blockchain, ou encore de se promener dans l’exposition Doodles aux couleurs pastel parfaitement instagrammables célébrant les jetons non fongibles.

Exit le Monty Python John Cleese, qui n’a définitivement pas compris les sensibilités de notre époque ; la nouvelle star de ce festival qui réunit digital, film et musique au Texas, est la chanteuse body positive Lizzo qui a acquis les cœurs des spectateurs de sa keynote avec cette citation : « On n'a pas toujours besoin d'être cool, parfois on peut juste être gentil ». Les (méta)influenceurs sont devenus créateurs, à la recherche de fonds pour les soutenir, et le Web3, cette troisième génération d’Internet qui reprend le pouvoir aux plateformes, pourrait bien être la solution.

Le Web2 rattrapé par le Web3

Les géants du Web2 essaient tant bien que mal de rester dans la course vers l’économie de créateurs décentralisée. Mark Zuckerberg a annoncé par visioconférence à SXSW l’intégration des NFT dans Instagram, Meta s'est associée à Rolling Stone pour créer une maison des créateurs avec des studios pour réaliser des vidéos et des démonstrations de ses casques de réalité virtuelle, Twitter a installé sa maison éphémère dans la rue historique de Rainey Street à Austin, avec des cabines permettant d'enregistrer des conversations audio en direct sur Spaces. TikTok a organisé une fête le samedi soir pour les créateurs de l'application de vidéos courtes, et on pourrait très bien s’imaginer pour l’année prochaine une marketplace NFT géante par Amazon, qui a ouvert un 2ème magasin Whole Foods juste à côté du centre de conférences. La plateforme de souscription Patreon a également organisé un événement sur plusieurs jours, qui comprenait un salon fermé pour les VIP et les créateurs. Toutes les plateformes ont mis en place des fonds de soutien à la création : Snap, YouTube (depuis ses débuts), Instagram, TikTok, pour lesquels se bat un nombre exponentiel d'artistes créateurs.

D'autres grandes plateformes sociales étaient en revanche absentes du SXSW, notamment YouTube, Snap, Pinterest et LinkedIn. L'économie de créateurs conquiert désormais le tapis rouge du festival de film, avec la première du documentaire controversé de Casey Neistat, vlogueur de longue date, sur son collègue David Dobrik.

Le phénomène TikTok

La table ronde 'TikTok a-t-il gagné la guerre des créateurs ?', a réuni une équipe de choc dans l'espace social/créateur : Kerry Flynn, journaliste de Media Deal pour Axios, Kaya Yurieff, journaliste de Creator Economy pour The Information, et Jules Lund, fondateur de Tribe, ont partagé leurs idées : "TikTok est le média social le plus addictif. C'est comme du crack... Instagram est l'application du vendredi soir quand vous êtes sur le point de sortir, mais TikTok est le dimanche matin quand vous riez en pyjama avec vos amis dans votre chambre." La formule magique est désormais : "si vous gagnez les créateurs, vous gagnez les utilisateurs, vous gagnez les annonceurs".

En 2019, Instagram était la star de SXSW. Après deux ans de pandémie, c'est définitivement TikTok qui a gagné la course à l'audience : moins soigné qu'Instagram, plus "humain", plus accessible (par la distribution non connectée, il y est plus facile d'atteindre rapidement une grande communauté), avec un concept de contenu publicitaire organique parfaitement intégré et plébiscité par les utilisateurs. TikTok est aussi une plateforme idéale pour y diffuser du liveshopping, capable de rapporter 1,9 milliards de dollars en 24 heures. Le liveshopping résout d'ailleurs tous les problèmes du marketing avec une mesure qui peut être directement branchée sur les ventes, sans intermédiaire, là ou Instagram Checkout ne publie pas de chiffres depuis 2018.

Dans la session presque scientifique 'What Makes TikTok Tick', Jorge Ruiz, Global Head Of Marketing Science chez TikTok et Pranav Yadav, CEO US & Europe chez Neuro-Insight, ont donné quelques recettes du succès de la plateforme d'origine chinoise, capable de générer une pénurie internationale de Feta suite à un clip vidéo de 30 secondes sur une recette de pâtes de la blogueuse culinaire finlandaise Jenni Häyrinen. Les scientifiques de Neuro-Insights mesurent les flux du cerveau pour comprendre comment au mieux activer notre mémoire à long terme responsable à 80% de nos prises de décision, pour améliorer encore le taux d'engagement de TikTok qui dépasse de loin celui des autres réseaux sociaux, avec des publicités organiques qui ont 44% de plus de succès que sur les plateformes concurrentes.

Prédictions provocantes et non-évidentes

SXSW est aussi l'occasion chaque année de s'inspirer des prédictions de futurologues stars de tout genre. Scott Galloway, professeur de Marketing à la NYU Stern ne déçoit jamais avec ses prédictions provocantes et son approche "tell-it-like-it-is". Il a fait une entrée fracassante avec son cynisme habituel, passant en revue les grands thèmes de l'année, notamment 'l'idiotie' du tourisme spatial, la course aux super-applications et la mort inévitable du Zuckerverse. La grande décentralisation du Web3 est pour lui plutôt une recentralisation, voire même une "bit-centralisation".

Sa plus grande révélation : selon Galloway, c'est la prise de conscience (ou peut-être le rappel) que notre bonheur est inextricablement lié au nombre de conversations profondes et significatives que nous avons dans nos vies. Des conversations qui nécessitent des relations profondes et significatives. Nous devrions nous concentrer sur la consolidation et la réparation de nos relations clés, que ce soit avec nos parents, nos frères et sœurs ou nos amis. Et il n'y a pas de meilleur moyen d'y parvenir que de se réunir - en personne - quand nous le pouvons, d'ailleurs l'un des leitmotifs de cette année.

Le discours principal de la futurologue Amy Webb (une session incontournable chaque année) est toujours un moment fort. SXSW est la base de lancement de son rapport sur les tendances technologiques émergentes. L'accent est mis cette année sur la re-perception et trois principales tendances : L'intelligence artificielle - l'incroyable accélération, en particulier dans la reconnaissance et la surveillance, le métavers et le Web3 - décentralisation, blockchain et cryptomonnaies, et la biologie synthétique - réseaux informatiques, alimentation, technologies agricoles et santé.

Rohit Bhargava, fondateur de la 'Non-Obvious Company', a partagé les meilleures et les pires prédictions issues de plus d'une décennie de curation de tendances à partir de tonnes de notes prises sur des post-its et une intelligence tout sauf artificielle. Voici ses 10 prédictions et opportunités pour notre avenir proche :

1/ Identité amplifiée - essayer de changer la perception de la manière dont nous sommes vus sur les différents médias sociaux et dans les métavers, multivers et métamultivers, il faudra se préparer à notre fracture identitaire
2/ Ungendering – pour dépasser les limites du genre, ou au moins les comprendre, avec des applis comme Woman Interrupted
3/ La connaissance immédiate – des vidéos YouTube ou Tasty à l'apprentissage haptique passif, une opportunité pour le marketing de contenu : comment aider les gens à devenir plus intelligents plus rapidement
4/ Revivalism - Kodak refait des pellicules, le retro pour inspirer la confiance
5/ En mode humain - réalisé avec l'empathie comme stratégie, à l’instar du 'Slow Checkout' dans les hypermarchés Tesco pour les personnes en difficulté ou du design produit pour les personnes handicapées
6/ Richesse de l’attention – sensationnalisme
7/ Le profit utile - Inglorious fruits and vegetables, réutilisation, recyclage
8/ Abondance de données - 90 % des données mondiales ont été créées au cours des deux dernières années, posez de meilleures questions cherchez plus d'informations
9/ Technologie qui protège - le four intelligent June, un renifleur d'aliments, donner la priorité à l'utilité
10/ 'Flux Commerce' - Crayola se lance dans une ligne de maquillage, un Hôtel Taco Bell, Cleveland whisky vieilli en 2 jours, la perturbation des hypothèses d'un secteur industriel donné

Les communautés au coeur de la création (et du marketing) 

Priya Parker, facilitatrice, conseillère stratégique, à l'origine du podcast du New York Times "Together Apart", auteure acclamée de 'The Art of Gathering: How We Meet and Why It Matters' a ouvert cette année le SXSW. Un cours magistral sur la participation du public et la facilitation pour créer des rencontres qui ont du sens, façon interessante de lancer le programme 2022, de retour IRL après deux ans dans l'espace virtuel. Priya Parker a déclaré que ce n'est pas le moment pour les gens de rester séparés. "Nous ne nous rassemblons pas seulement pour nous échapper. Nous nous rassemblons pour nous engager", a déclaré Parker. "Et nous ne nous réunissons pas seulement pour célébrer. Nous nous rassemblons pour pleurer, pour faire notre deuil et pour donner un sens à ce qui se passe dans le monde en ce moment."

SXSW était aussi l'occasion de partager des émotions : l'une des plus importantes salles du SXSW n'était pas assez grande pour accueillir la communauté de fans qui voulait voir la superstar Lizzo, lauréate de trois Grammy Awards. Le message de Lizzo sur l'amour du corps et la positivité résonne depuis que son premier tube de 2019, Truth Hurts, est devenu le numéro un le plus long de l'histoire pour une artiste rap solo. Maître de la promotion, Lizzo a présenté sa nouvelle émission Amazon Prime Video 'Watch Out for the Big Grrrls' avec son équipe en soutien dans la salle.

Dans un tout autre genre, Paris Hilton a appelé à ce que le SXSW "fasse rage dans le métavers" pendant sa performance DJ. Elle a tout intérêt à faire la promotion du métavers et des NFT, ayant créé son propre métavers "Paris World" et étant elle-même heureuse propriétaire d'un NFT Bored Ape qu'elle avait l'occasion de montrer en janvier dans "The Tonight Show Starring Jimmy Fallon". Une séquence moquée sur les réseaux sociaux, où, à la manière des cartes Panini, les deux stars se sont échangés des photos de leurs jetons non fongibles Bored Ape respectifs - celui de Fallon vaut environ 215 000 dollars et celui de Hilton 300 000 dollars. "Nous faisons partie de la même communauté !" s'est exclamé Fallon. "Nous sommes tous les deux des singes !" On assiste certainement à la création d'une nouvelle clique cryptographique à Hollywood.

Du côté de la communauté familiale, Roman Coppola a lancé un projet qui utilise la blockchain pour financer des films, soutenu à hauteur de 300K par Steven Soderbergh. 'Decentralized Pictures' a aussi sa propre cryptomonnaie (ou tokens, comme préfère les appeler Roman Coppola). L'association à but non lucratif cofondée par Roman Coppola, Leo Matchett, vétéran de la technologie et du divertissement, et Michael Musante, cadre d'American Zoetrope, et dirigée par un conseil d'administration comprenant Sofia et Gia Coppola, a pour mission de découvrir et de soutenir les cinéastes sous-représentés. "En un sens, il s'agit d'un fonds cinématographique sélectionné démocratiquement", a déclaré Musante. "Au lieu d'un conseil d'administration composé de cadres, c'est notre communauté qui décide, qui donne son avis et qui dit aux gens ce qu'ils aiment."

Enfin, ce sont aussi les communautés de sportifs qui sont de nouvelles cibles marketing de l'économie Web3. L'United States Football League (USFL) s'associe aux Blockchain Creative Labs (BCL) de FOX Entertainment pour lancer une place de marché NFT pour les objets de collection numériques, présentée par Daryl Peter "Moose" Johnston, une star du football aux Etats-Unis. Autant de nouvelles façons de s'identifier les uns aux autres par la propriété.

Economie des créateurs contre étoiles filantes des médias, la fin du modèle 100% publicitaire

Alors que Disney Streaming, Amazon et Netflix ont octuplé leur contenu, et que Discovery Inc et WarnerMedia ont fusionné pour former DiscoBros, Evan Schapiro - eshap - affirme que l'on assiste à une bataille entre les créateurs et les plateformes. Steven Rosenbaum, directeur exécutif du NYC Media Lab, s'est entretenu avec lui dans un 'fireside chat' sur l'avenir des médias face à l'économie des créateurs. Avec des plateformes comme Apple TV et Netflix qui dépensent des sommes considérables en contenu, les créateurs ne deviendront-ils pas un peu plus que les propriétés hautement rémunérées des plateformes qu'ils servent ? Dans une cartographie impressionnante, Shapiro démontre l'inversion des valeurs dans la grande galaxie des plateformes et des médias, où Nvidia a doublé de valeur quand Meta en a perdu la moitié, et où Apple pourrait facilement acheter toutes les entreprises sur la carte.

Mais dans le Web3, à chaque fois que des NFT sont vendus, les taxes vont au créateur, pas à Apple. Patreon a trouvé une nouvelle réponse aux publicités : 1000 personnes paient 5 dollars par mois. Pour Evan Shapiro, la société de création sera égale à la télévision. La recette de survie est la diversification : Apple est un acteur majeur du système d'éducation, le groupe Axel Springer se lance à la conquête internationale et Amazon vient de créer Amp, une appli live radioLa plus grande astuce d'Amazon : prendre les lignes de dépenses les plus importantes et les transformer en revenus. Selon Gavin Bridge et Andrew Wallenstein de la Variety Intelligence Platform (VIP+), Amazon est en train de se transformer en un "réseau de médias de détail". Amazon a désormais son propre téléviseur, les gens achètent des téléviseurs sur Amazon, entre les wearables et ses magasins Whole Foods, Amazon est capable de contrôler la santé de la population. Amazon vient aussi de conclure son deal avec MGM pour des milliers de films et d'épisodes de séries télévisées, une grande partie de ce contenu finira par apparaître sur IMDb TV, le service de streaming gratuit d'Amazon, financé par la publicité.

Evan Schapiro et Steven Rosenbaum

Disney est peut-être le plus diversifié après Amazon : le département des parcs de Disney (un métavers en soi) surpasse Netflix qui perd 2% d'abonnés chaque mois. Les chiffres de Netflix en janvier sont en baisse, mais ceux de Disney sont en hausse. Meta, en revanche, vit à 98 % de la publicité, et Alphabet à 89 %. On assiste à une "new quadropoly" : TikTok s'invite dans l'affaire avec une croissance plus rapide que n'importe qui d'autre - il ne s'agit pas d'un simple chiffre mais de l'épicentre de la culture des jeunes. Des modèles entièrement sans publicité ne sont en revanche pas non plus adaptés à tous les marchés (y compris le marché américain et européen, où de plus en plus de ménages souffrent de la crise économique) : Disney a annoncé un volet publicitaire pour son service et Netflix n'a pas d'objection à intégrer des éléments de publicité à l'avenir.

Nicholas Thompson, The New Yorker, Wired, The Atlantic et Adam Davidson, auteur de The Passion Economy, ont essayé de regarder 'Au-delà du next big thing dans les médias' qui pourrait consister en des NFT frappés à chaque article avec un biais évident dans le cas cité de Wired qui avait acheté des bitcoins et en retour publié des articles positifs sur le sujet. Pour Nicholas Thompson, notre façon de raconter l'actualité est trop étroite, il faudra trouver de nouveaux formats, et réussir à retenir les talents qui partent sur Substack en leur donnant plus de liberté dans les rédactions pour trouver une nouvelle façon pour les individus de monétiser leurs compétences.

A chacun son service de streaming de news

L'année dernière a été la première année où le streaming a produit plus d'émissions que la télévision. La couverture de la guerre en Ukraine est en train de réorganiser le paysage de streaming autour de l'actualité. Toutes les chaînes américaines d'information par câble ont lancé une chaîne de diffusion en continu, "pour rester pertinent". Rashida Jones de MSNBC détaille leur stratégie : "Nous avons une sorte de voix unifiée et un message unifié de ce que nous faisons et nous nous rendons disponibles dans plus d'endroits. "Si vous êtes intéressés par ces 24 heures d'informations brutes et non partisanes, vous avez News NOW dans notre portefeuille. Si vous êtes intéressés par le contexte, la perspective et l'analyse de l'actualité pendant 24 heures, vous avez MSNBC sur Peacock. Si vous êtes intéressés par une version hybride de ces informations sur le câble, vous avez MSNBC. Si vous êtes intéressés par le buzz de la journée, vous avez TODAY, Nightly News, Dateline et Meet the Press. [...] Nous sommes partout où les gens se trouvent, et nous allons sur ces plates-formes parce que c'est là qu'ils se trouvent, mais nous apportons le même contenu de haute qualité sur chacune de ces plates-formes".

Pour CNN, SXSW était l’occasion de lancer son service de streaming CNN+ qui proposera à partir du 29 mars des versions quotidiennes des émissions hebdomadaires de CNN, des programmes inédits, des séries et des films originaux, ainsi qu'une bibliothèque complète de contenus CNN d'archives. Proposé au prix de 5,99 dollars par mois ou de 59,99 dollars par an, CNN+ présentera une gamme de visages du réseau, dont certains sont déjà connus des téléspectateurs, tandis que d'autres, comme Chris Wallace, rejoignent l'équipe en provenance d'autres médias. CNN assume l'idée que l'information peut devenir un divertissement.

Amy Webb ne croit pas aux NFT

Des entreprises allant de Doodles au constructeur de voitures de luxe Porsche ont proposé des divertissements autour du thème des NFT aux milliers de participants qui se sont rendus en personne au Texas. Mark Zuckerberg a annoncé que les utilisateurs d'Instagram pourront, à terme, frapper leurs NFT, ou publier une image numérique sur la blockchain. Selon une étude récente de NonFungible.com et de L'Atelier BNP Paribas, les ventes de NFT atteindront 17,7 milliards de dollars en 2021, contre 82,5 millions de dollars en 2020. Mais alors que le nombre d'acheteurs et de vendeurs a considérablement augmenté, le chiffre n'a pas progressé autant que le total des ventes, ce qui peut refléter les critiques selon lesquelles les NFT sont une bulle spéculative, ou un marché frénétique qui se stabilisera avec le temps. Dans sa conférence, Amy Webb a d'ailleurs clairement affiché son scepticisme face aux NFT, tout comme nombre d'autres spécialistes de la tech et des usages, à l'instar de l'investisseur milliardaire Mark Cuban qui a affirmé que les NFT sont dans une bulle.

Malgré ces réticences, SXSW a vu apparaître cette année le concept des "POAP", des badges NFT uniques de type "protocole de preuve de présence" remis aux participants d'événements virtuels et réels. Chaque participant n'avait qu'à scanner un QR code pendant l'événement, et était récompensé par un moyen unique et gratuit pour se souvenir de son expérience, stocké à jamais sur la blockchain.

Ben McKenzie, l'acteur connu pour ses rôles dans des séries télévisées telles que Gotham et The OC, qui s'est également prononcé contre les personnalités publiques qui soutiennent la crypto-monnaie, a animé un panel au SXSW avec Jacob Silverman, rédacteur de The New Republic, et Edward Ongweso, de Vice Media. Alors que McKenzie a déclaré que l'utilisation généralisée de produits liés à la crypto au festival semblait être un outil de marketing, Ongweso a ajouté qu'il voyait un thème cohérent aux entreprises faisant la promotion des NFT : "Je m'attendais simplement à des gadgets plus intéressants, des démonstrations, des tentatives de montrer l'utilisation réelle de la valeur, quelque chose de fascinant et d'intéressant à ce sujet. Au lieu de cela, une grande partie est vraiment centrée sur une expérience très étroite qui va peut-être vous séduire, mais qui ne va pas loin dans la réflexion sur la façon dont cela peut réellement faire autre chose que vous rapporter de l'argent, si vous avez de la chance."

Les maisons Meow Wolf et Fluf World ont proposé des expériences sensorielles, une façon d'intégrer les NFT dans un environnement métavers, avec des QR codes partout pour acheter des jetons non fongibles.

Au revoir dans le métavers ?

Cristiano Amon de Qualcomm a cependant déclaré que nous sommes plus proches du métavers que les gens ne le pensent : "Le nombre d'appareils qui sont construits pour la réalité virtuelle, la réalité augmentée, la réalité mixte est important, quelle que soit la mesure." En Chine, un milliard de personnes sont déjà dans le métavers et l’application sociale virtuelle « Jelly» a dépassé pour une semaine le téléchargement de l’appli WeChat et est devenue l’appli la plus téléchargée avant d’avoir été retirée des stores pour défauts techniques.

Reggie Fils-Aimé, ex-directeur de Nintendo a déclaré dans sa keynote qu'il n'était "pas un acheteur" de la vision de Meta pour le métavers. Bien qu'il reconnaisse les mérites de la VR dans les contextes sociaux et de jeu, selon lui, les gens ne vont pas passer la majeure partie de leur journée avec un casque de VR. "Je ne crois pas qu'il s'agira d'une expérience que vous ferez pendant 100 % de votre temps, ou même pendant 100 % de votre temps de divertissement", a-t-il déclaré. Pour lui, les lunettes AR seraient plus adaptées à un usage quotidien. Niantic (la société à l'origine de Pokemon Go) va dans le même sens avec son "Real World Metaverse" basé sur son SDK Lightship : un métavers non dystopique pour proposer une expérience du monde qui n'était pas possible avant.

Dans une table ronde qui a réuni Edelman, Norton et AWS, Darren Shou, directeur de la technologie de NortonLifeLock a posé la question : "Que pouvons-nous faire pour créer plus d'empathie, plus d'équité, à travers les actions que nous prenons aujourd'hui ?"Cela commence par s'assurer qu'une diversité de voix et de points de vue est incluse dans le métavers, a déclaré Taj Reid, directeur mondial de l'expérience chez Edelman. Cela signifie que les appareils qui permettent le métavers doivent être peu coûteux et largement disponibles, a ajouté Reid. Selon une enquête initiée par Norton, trois quarts des Américains ne sont pas familiers avec le terme de métavers. Mais lorsqu'on leur pose la question de ce qu'ils souhaiteraient y faire, la réponse est claire : des choses qu'ils ne pourraient pas faire dans la vie réelle. Nul besoin donc de créer une copie conforme de notre réalité (avec tous ces défauts), le métavers devra plutôt se concentrer sur des expériences augmentées ou encore sur l'inclusion de personnes en difficulté. Dans ce cas, il pourrait se transformer en véritable machine à empathie, qui nous permettra de mieux comprendre le monde qui nous entoure, après des années de polarisation dans les réseaux sociaux.

Sur la question des contenus média dans le métavers, Shannon Snow, Responsable du divertissement de Meta, avait très peu d'idées, mis à part quelques lenses AR, une Watch Party et des concerts dans Horizon Venues en parallèle d'un Facebook Live. Il reste donc à inventer tout un monde de contenus pour le métavers, pas forcément à destination de la plateforme de Mark Zuckerberg.

Conclusion

Pour Nick De La Mare qui a présenté les Fjord Trends, nous sommes entrés dans une nouvelle ère de réflexion. Nous avons la possibilité de décider à quoi ressemblera la renaissance du XXIe siècle. Voulons-nous être descriptifs ou prescriptifs au sujet de notre avenir ? Qui aura le contrôle de ce nouveau monde virtuel ? Les méga plateformes de médias sociaux sont aujourd'hui les gardiens du contenu. Dans un web décentralisé cryptographique, aura-t-on encore besoin de gardiens ? Le consensus semblait à SXSW que tout ne peut pas être décentralisé. On aura peut-être bien besoin d'un badge bleu Twitter pour la blockchain.

Sur fond de métavers et de NFT, chaque conférence et table ronde nous affirmait ô combien on était contents de se retrouver In Real Life. Entre hot-dogs gratuits d'Audible et Porsche Unseen, SXSW 2022 a marqué la fin de l’abondance et la nécessité de passer de l'extraction à la régénération. Le festival de la Silicon Valley a cette fois-ci invité les Nordiques. Amy Webb s’est entretenu avec Anna Tillberg Pantzar de H&M (l’avenir est circulaire), Sven Stormer Thaulow de Schibsted et Anssi Komulainen anciennement YLE Beta Lab, qui lui ont appris que la digitalisation de leurs pays est tellement avancée que l’on peut y régler ses impôts par un simple sms. Cela pourra certainement faciliter la déclaration d'impôts des futurs créateurs du métavers.