Même ennuyée par la question, la patronne du principal site de presse allemand n'a pas hésité : le projet de loi en préparation en Allemagne pour aider les journaux face à Google ne les sauvera pas.
"Nous y dépensons beaucoup d'énergie, de temps, et d'intelligence. Mais cela ne nous sauvera pas. Nous ne déboucherons ni sur un nouveau modèle d'affaires, ni sur un modèle de licence", a déclaré cet après-midi à Münich, Katharina Borchert, PDG du Spiegel Online lors de la conférence DLD.
"Nous profitons beaucoup d'un trafic énorme venant de Google, qui a une grande valeur. Mais nous ne savons pas assez le monétiser".
"A vrai dire, ce qui m'inquiète le plus aujourd'hui et qui constitue un défi plus important, c'est l'accélération de la fragmentation des audiences", permise par les recommandations sur les réseaux sociaux, a-t-elle ajouté.
Martin Nisenholtz, longtemps patron du New York Times Digital et aujourd'hui conseiller du PDG, a renchéri : "se polariser sur Google est une distraction et non un modèle d'affaires. C'est aux médias de trouver les nouveaux moteurs de la croissance et de s'appuyer sur leur marques". "Ce n'est pas la faute de Google".
Mais, ajoute-t-il, comme "Google est en train d'orienter davantage son classement ("page rank") vers la notion d'autorité, plus complexe à définir mais qui devrait inclure les signatures, il pourrait très bien mieux nous indexer".
Katharina Borchert a aussi émis des craintes sérieuses sur la séparation de plus en plus menacée entre la rédaction et le business en raison de la nouvelle tentation des annonceurs de devenir eux mêmes des médias et leur capacité à insérer des contenus de haute qualité, y compris en vidéo. "Il faudra éduquer les gens sur la différence (...) car ils sont de plus en plus nombreux par exemple à chercher une info automobile directement sur le site très bien fait du constructeur".
Pour le blogueur et professeur américain Jeff Jarvis, les journalistes doivent désormais ne plus se contenter de produire des contenus mais construire des plateformes et y proposer des services à valeur ajoutée. "Leur autorité viendra de leur capacité à ajouter des choses pertinentes aux flux" de Google ou des médias sociaux.
Le président du New York Times, Arthur Sulzberger, a enfin laissé entendre, de son coté, qu'après l'ouverture récente d'une édition en ligne du journal en Chinois -- pour l'instant bloquée par les autorités--, il n'entendait pas en rester là et allait lancer de nouvelles éditions en langues étrangères.