(revoici avec quelques compléments d'infos donnés par Claire Leproust mercredi 20/2)
"Le facteur temps est important. On essaie de piger (...)", résumait vendredi Claire Leproust de l'agence CAPA, un des plus grands producteurs audiovisuels français, en dressant un premier bilan de "Rendez-vous à Paris", la chaîne originale YouTube lancée il y a trois mois avec comme ligne éditoriale, "la bonne humeur et plein d'énergies créatives, made in Paris !"
Cette chaîne, qui compte aujourd'hui 9.700 abonnés et 750.000 vues, propose une trentaine d'heures de création originale par an, faites à Paris et autour du thème de la capitale, y compris de courtes fictions qui font travailler des auteurs et d'autres petits producteurs extérieurs.
S'exprimant devant la commission "TV connectée" du GESTE, la directrice des développements numériques de CAPA a tiré quelques enseignements :
Quels sont les contenus qui marchent ?
"Ce qui marche auprès des ados, c'est le premier degré. Et il faut aussi absolument utiliser en complément les réseaux sociaux, y compris par les créateurs, et acteurs eux-mêmes".
"Pour notre chaîne, nous visons une cible plus âgée (25-35ans) et avons décidé de diffuser des fictions originales comme L'AGENCE, une série qui se moque du monde de la com ou BEFORE, la série de l'APÉRO et fin février, la vie desespérée de GUENA, adaptée du blog éponyme qui traite avec humour du quotidien d'une jeune femme homosexuelle".
Quelle est l'audience ?
- "Tout se joue dans les 20 premières secondes de la vidéo (...) Si on n'est pas convaincant, on perd jusqu'à la moitié de l'audience (...) Le levier de l'authenticité et de la complicité avec l'audience est fondamental".
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"Sur YouTube, comme à la télé, il y a des carrefours d'audience: les YouTubers qui ont déjà agrégé des communautés et les suggestions/recommandations de YouTube qui sont en fait de la vraie programmation.
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"Plus on est sur des écrans connectés, plus le marketing est important". Le marketing, c'est près de la moitié des ressources en temps et argent.
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"L'audience vient à 60% de l'écosystème YouTube (suggestions, mises en avant...). Les abonnés représentent entre 5 et 20% de cette audience".
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"20% de l'audience consomme nos contenus via mobiles, smart phones et tablettes".
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"Nous n'avons pas l'habitude de nous adresser aux jeunes (...) Nous avions visé les 25-35 ans, or notre audience est très jeune : à 36% ce sont des ados de 13 à 17 ans (et plus probablement 8 - 17 ans), qui entrent directement dans YouTube et arrivent chez nous; à 25% des jeunes adultes de 18 à 34 ans et pour eux c'est la recommandation qui marche, enfin à 25% des adultes connectés de 35 à 54 ans.
Avec quels partenariats ?
La Mairie de Paris (pour son city guide, ses fans Facebook et ses abonnés Twitter, les Inrockutibles. Mais aussi l'entre-aide des autres chaînes originales YouTube.
Un modèle économique apparaît-il ?
C'est clair : même avec de la pub partout, "aujourd'hui, il n'y a pas de "business model". Nous avons un vrai sujet de monétisation. Si on est tout seul avec sa caméra, c'est jouable. Mais pas avec une structure, comme chez CAPA", où les programmes courts (3 à 7 mn) proposés sur YouTube coûtent entre 800 et 3.500 € à produire (parfois grâce aussi à un complément du CNC).
"Notre objectif est néanmoins de créer un actif avec programmes de qualité".
Quel type d'accord avec YouTube ?
- Un contrat de 3 ans avec un minimum garanti de recettes publicitaires la 1ère année qui permet de financer deux postes et demi d'une petite structure dédiée, mais aussi des programmes (les deux tiers des coûts).
- L'exclusivité mondiale sur tous les supports est donnée à YouTube pendant la durée de l'accord (3 ans).
Avec quels buts ?
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Développer des programmes supplémentaires, de longue traîne, des formats hybrides.
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Utiliser le web pour développer des narrations et des concepts différents, notamment autour des webdocumentaires.
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Apprendre le métier d'éditeur ("on en rêvait"), mieux cerner d'autres métiers, apprendre à verticaliser les nouveaux métiers (mise en ligne, animation de communautés, nouvelles écritures...), pouvoir financer une R&D, trouver des nouveaux leviers de captation d'audience, faire émerger des nouveaux talents.
Conclusion au bout de trois mois ?
"On veut continuer à être pionnier !"
"Rendez-vous à Paris" est l'une des 13 chaînes originales YouTube lancées entre fin 2012 et début 2013 en France avec le soutien de la filiale vidéo de Google. D'autres ont été lancées en Grande Bretagne et Allemagne, après que YouTube en ait lancé une centaine aux Etats-Unis l'an dernier. YouTube propose une avance sur recettes et demande l'exclusivité de contenus originaux.
En France, YouTube revendique près de 30 millions de visiteurs uniques par mois et 2,4 milliards de vidéos vues par mois via le player YouTube (dont 25% via mobiles), a ajouté Virginie Courtieu, directrice des partenariats de YouTube à Paris.
"Il est trop tôt pour faire un bilan des 13 chaînes originales", a-t-elle précisé. "Elles sont dans de bonnes trajectoires. Une d'entre elles se détache, Studio Bagel, qui compte 180.000 abonnés et 12 millions de vidéos vues en trois mois. Mais elle fédère en fait des talents et des communautés qui étaient déjà sur YouTube".
(Disclosure: je préside cette commission TV connectée du Geste avec Stanislas Leridon co-fondateur de Dotscreen)