Par Barbara Chazelle et Alexandre Bouniol, France Télévisions, MédiaLab
Impossible de passer à côté des Stories ! Après Snapchat, Instagram, Facebook, WhatsApp, YouTube et désormais… Spotify, ce mode de narration verticale interactif a pris une place à part entière dans l’édition de contenus. Si le format est né sur les plateformes sociales, il n’a pas vocation à y rester pour autant.
Précurseur de ce mouvement, Le Figaro a intégré ses Stories dans son application dès 2016 et franchit aujourd’hui même une nouvelle étape en décidant de les convertir au format AMP (Accelerated Mobile Pages). Lancé en février 2018 par Google, il permet aux éditeurs d’intégrer des Stories directement sur leurs sites qui seront ainsi référencées dans le moteur de recherche Google.
La technologie AMP
La technologie AMP repose sur un allègement des pages pour réduire le débit et diminuer mécaniquement le temps de chargement. Le temps de chargement étant un facteur clé de trafic (d’autant plus sur mobile !), ces pages permettent d’améliorer significativement l’expérience utilisateur.
La même logique s’applique aux AMP Stories : réduire au maximum le temps de chargement de ces dernières pour maintenir une expérience utilisateur fluide.
Pourquoi Google s’intéresse aux Stories
Tout le monde a copié Snapchat. Consommées par des centaines de millions de personnes chaque jour, la popularité des Stories attire tous les géants du numérique qui peuvent monétiser le format. Au-delà du format en lui-même, c’est l’engagement qu’il génère qui le rend attractif. Les annonceurs n’hésitent plus à investir dans les Stories. C’est donc un moyen pour Google de générer de nouveaux revenus et de se positionner à terme comme un concurrent des plateformes sociales qui tiraient jusqu’à présent la grande majorité des revenus de la publicité du format vertical.
AMP Stories s’inscrit complètement dans la nouvelle stratégie de Google, qui cherche à diversifier ses SERP (Search Engine Resultats Page). Encore récemment, Google a annoncé que les podcasts s’afficheraient directement dans les résultats de recherche. Google rebat ainsi les cartes des stratégies de distribution de contenus qui opéraient jusqu’à présent et peut espérer capter de nouvelles sources de revenus publicitaires en proposant ces nouveaux formats.
C’est aussi le symbole de la prise du pouvoir du mobile dans le trafic internet. Aujourd’hui 60% des recherches Google proviennent du mobile. Nous percevons bien la volonté de Google d’adapter au mieux ses services aux usages du web. Cependant, bien que le format ait été développé pour mobile initialement, les AMP Stories sont également accessibles via desktop.
De nouvelles perspectives pour les médias
Opportunité pour les plateformes donc, mais aussi (et surtout !) pour les médias ! Les médias ont déjà investi le format ; notamment sur Snapchat et Instagram quoique encore sous-exploité. Les stories leur permettent souvent de toucher de nouveaux publics. Mais à l’heure actuelle, la monétisation des Stories sur les différents réseaux sociaux est relativement faible. Les contraintes (temps d’affichage d’un panneau imposé ; dépendance auprès des plateformes…) restent fortes. Les AMP Stories ouvrent de nouvelles perspectives. Le format étant à la fois en open source et diffusé au sein même du site des éditeurs, ils sont à la fois maîtres de la distribution et du développement du format en lui-même. Un basculement majeur dans la relation de dépendance vis-à-vis des plateformes sociales.
C’est dans cette perspective de garder la main sur son contenu que Le Figaro, qui faisait partie des premiers médias français à se lancer sur Snapchat, a décidé en 2016 d’intégrer ce format directement dans son application avec une “solution maison”.
“ Nos Stories sont pensées pour les lecteurs du Figaro. Nous ne sommes pas dans une logique de rajeunissement du public, mais sur une recherche narrative servicielle, complémentaire de nos autres contenus. Le lectorat qui consomme des Stories au sein de notre application a entre 40 et 45 ans, avec un excellent taux d’ouverture entre 40.000 et 50.000 par stories ” explique Stéphane Saulnier, Rédacteur en chef Data & Infographie.
Recherche narrative qui a conduit Le Figaro a lancé plusieurs formats de Stories comme “De vous à moi”, “Les mots de…” et teste en ce moment une série en 5 épisodes sur le populisme. Des formats moins incarnés que ce que l’on peut voir sur les réseaux sociaux et qui s’appuient sur du texte et des séquences d’interview.
En basculant sur AMP, Le Figaro est conscient que ses Stories toucheront un public plus large via le référencement Google et a d’ores et déjà entamé une réflexion éditoriale.
“Nous travaillons sur une refonte de notre site pour la rentrée : les Stories y auront une place de choix. Nous n'excluons pas une option premium et espérons une appropriation encore plus forte de ce format par notre rédaction et équipes éditoriales” nous confie Stéphane Saulnier.
Différents médias aux Etats-Unis ont commencé à expérimenter les AMP Stories à l’instar de CNN, Mashable ou encore Wired. La BBC a également intégré un onglet dédié. En France, Le Parisien les expérimente depuis un an.
Vous voulez créer vos propres AMP Stories ? Les étapes à suivre et quelques conseils avant de vous lancer.