Liens vagabonds : Hollywood, Cannes et l'IA - Méta-media

À RETENIR CETTE SEMAINE

Le cinéma face à l'IA - En grève depuis le 2 mai, les scénaristes de l’industrie du cinéma et de la télévision ont de multiples revendications. L’encadrement des usages de l’intelligence artificielle (IA) est l’une des pierres d’achoppement des négociations avec les gros studios hollywoodiens. La dernière fois que la Writers Guild of America [WGA] a fait grève, en 2007, ses membres s’organisaient face au secteur naissant du streaming, exigeant des residuals [droits versés aux acteurs et à l’auteur à l’occasion d’une rediffusion d’un programme télévisé ou d’un film] plus élevés pour les contenus diffusés en streaming. Au festival de Cannes se pose aujourd'hui la question si l'intelligence artificielle va "démocratiser la créativité" ou conduire à la catastrophe ?

Damn—the SAG-AFTRA National Board has agreed unanimously to recommend that its members vote to authorize a strike.

Some of the reasons listed below. Resisting the studios' use of AI seems to be uniting actors and writers. This just got interestinghttps://t.co/VnslCiUYVD pic.twitter.com/yJHXDutE6K

— Brian Merchant (@bcmerchant) May 18, 2023

Les scénaristes protestent d’abord contre les bas salaires et les conditions de travail précaires. L’explosion du streaming s’est faite alors que les salaires ont stagné pendant la dernière décennie. Mais l'éléphant dans la pièce est surtout la question de l'avenir des métiers créatifs face à une IA de plus en plus prolifique. Enjeu majeur pour l'industrie du divertissement, l’IA est en train de transformer la manière dont les scénarios sont écrits et les films produits. Des algorithmes de plus en plus sophistiqués sont déjà capables de générer des scénarios (comme il en existe des milliers), d'écrire des dialogues et de prédire le succès commercial d'un film. Mais les spéculations, comme celle du réalisateur Joe Russo qui pense qu’un jour vous pourrez peut-être créer une comédie romantique mettant en vedette votre avatar et celui de Marilyn Monroe, relèvent (pour l'instant) encore de la science-fiction. Les scénaristes d'Hollywood adorent les histoires de robots, car elles révèlent les capacités qui les distinguent en tant qu’êtres humains : l’imagination et l’invention.

Alors la mise en place de garde-fous, pour préserver la créativité humaine et la diversité des histoires, et de protocoles d'éthique, pour garantir une utilisation responsable de la technologie, sont plus que jamais nécessaires. À Cannes, à la conférence de presse précédant l’ouverture officielle du 76e festival de cinéma, le président Ruben Östlund a apporté son soutien aux scénaristes, et pour l'acteur Sean Penn, le débat sur l'IA est une "obscénité humaine". En même temps, cette année, sur la croisette, deux géants du streaming, Apple et Amazon, découvrent les charmes des salles de cinéma. Ils présentent des films qui seront d’abord exploités en salle avant d’être proposés en streaming. Apple a annoncé son intention d’investir 1 milliard d’euros par an dans la production de films destinés d’abord au grand écran. Entre géants de la tech, IA et avatars d'acteurs, Hollywood voit son modèle économique bousculé.

CETTE SEMAINE EN FRANCE

3 CHIFFRES

1$ / minute Le montant que l'influenceuse sur Snapchat Caryn Marjorie dit facturer aux clients pour parler avec CarynAI, une "petite amie virtuelle" formée sur 2 000 de ses vidéos YouTube. Le chatbot Telegram, qui est alimenté par la technologie GPT-4 d'OpenAI, a rapporté à Marjorie plus de 70 000 $ en moins d'une semaine, selon des documents financiers consultés par Fortune. Le seul problème? Il continue de s'engager dans des conversations sexuellement explicites… [Fortune]
40 milliards de dollars de revenus sur tous les produits de la plate-forme, au cours des 12 derniers mois, générés par Youtube, selon son PDG Neal Mohan [Business Insider]
5 millions d’utilisateurs revendiqués par Netflix à son offre d’abonnement supportée par la publicité [The Verge]

LE GRAPHIQUE DE LA SEMAINE